Τὴν εἶδα τὴν Ξανθούλα,
τὴν εἶδα ψὲς ἀργά,
ποὺ ἐμπῆκε στὴ βαρκούλα,
νὰ πάῃ στὴν ξενιτειά.
Ἐφούσκωνε τ᾿ ἀέρι
λευκότατα πανιά,
ὡσὰν τὸ περιστέρι
ποὺ ἁπλώνει τὰ φτερά.
Ἐστέκονταν οἱ φίλοι
μὲ λύπη, μὲ χαρά,
καὶ αὐτὴ μὲ τὸ μαντήλι
τοὺς ἀποχαιρετᾷ.
Καὶ τὸ χαιρετισμό της
ἐστάθηκα νὰ ἰδῶ,
ὥσπου ἡ πολλὴ μακρότης
μοῦ τὄκρυψε κι αὐτό.
Σ᾿ ὀλίγο σ᾿ ὀλιγάκι
δὲν ἤξερα νὰ πῶ,
ἂν ἔβλεπα πανάκι,
ἢ τοῦ πελάγου ἀφρό.
Καὶ ἀφοῦ πανί, μαντήλι,
ἐχάθη στὸ νερό,
ἐδάκρυσαν οἱ φίλοι,
ἐδάκρυσα κι ἐγώ.
τὴν εἶδα ψὲς ἀργά,
ποὺ ἐμπῆκε στὴ βαρκούλα,
νὰ πάῃ στὴν ξενιτειά.
Ἐφούσκωνε τ᾿ ἀέρι
λευκότατα πανιά,
ὡσὰν τὸ περιστέρι
ποὺ ἁπλώνει τὰ φτερά.
Ἐστέκονταν οἱ φίλοι
μὲ λύπη, μὲ χαρά,
καὶ αὐτὴ μὲ τὸ μαντήλι
τοὺς ἀποχαιρετᾷ.
Καὶ τὸ χαιρετισμό της
ἐστάθηκα νὰ ἰδῶ,
ὥσπου ἡ πολλὴ μακρότης
μοῦ τὄκρυψε κι αὐτό.
Σ᾿ ὀλίγο σ᾿ ὀλιγάκι
δὲν ἤξερα νὰ πῶ,
ἂν ἔβλεπα πανάκι,
ἢ τοῦ πελάγου ἀφρό.
Καὶ ἀφοῦ πανί, μαντήλι,
ἐχάθη στὸ νερό,
ἐδάκρυσαν οἱ φίλοι,
ἐδάκρυσα κι ἐγώ.
[Δὲν κλαίγω τὴ βαρκούλα,
δὲν κλαίγω τὰ πανιά,
μὸν’ κλαίγω τὴν Ξανθούλα
ποὺ πάει στὴν ξενιτειά.
Δὲν κλαίγω τὴ βαρκούλα
μὲ τὰ λευκὰ πανιά,
μὸν’ κλαίγω τὴν Ξανθούλα
μὲ τὰ ξανθὰ μαλλιά.]
δὲν κλαίγω τὰ πανιά,
μὸν’ κλαίγω τὴν Ξανθούλα
ποὺ πάει στὴν ξενιτειά.
Δὲν κλαίγω τὴ βαρκούλα
μὲ τὰ λευκὰ πανιά,
μὸν’ κλαίγω τὴν Ξανθούλα
μὲ τὰ ξανθὰ μαλλιά.]
envoyé par Riccardo Venturi - Ελληνικό Τμήμα των ΑΠΤ "Gian Piero Testa" - 10/9/2024 - 22:48
Langue: italien
Μετέφρασε στα ιταλικά / Versione italiana / Italian version / Version italienne / Italiankielinen versio:
Riccardo Venturi, 11-9-2024 01:22
Riccardo Venturi, 11-9-2024 01:22
Due parole del traduttore. Ammetto di essermi forse lasciato un po’ prendere la mano nell’ottocentizzare questa versione; ma tutto sommato, con un vate come Solomòs ci può anche stare, oggiù...
Performed by Dimitra Galani, Petros Klampanis, Thomas Konstantinou, Spyros Manesis and Christos Rafalides
Performed by Dimitra Galani, Petros Klampanis, Thomas Konstantinou, Spyros Manesis and Christos Rafalides
La Biondina
L’ho vista, la Biondina,
l’ho vista a tarda sera
salir sulla barchetta
per l’esilio partir.
Ed il vento gonfiava
le candide vele,
sì come la colomba
che distende le ali.
Stavano gli amici
con gioia e con dolore,
e lei, a salutarli
col fazzoletto sta.
Ed io quel suo saluto
ristetti lì a guardar,
finché la gran distanza
più non mi fe’ veder.
A poco a poco... ma
più dire io non so
se vedevo una vela
o la spuma del mar.
La vela e il fazzoletto
si persero nel mare,
e piansero gli amici,
e piansi io con lor.
L’ho vista, la Biondina,
l’ho vista a tarda sera
salir sulla barchetta
per l’esilio partir.
Ed il vento gonfiava
le candide vele,
sì come la colomba
che distende le ali.
Stavano gli amici
con gioia e con dolore,
e lei, a salutarli
col fazzoletto sta.
Ed io quel suo saluto
ristetti lì a guardar,
finché la gran distanza
più non mi fe’ veder.
A poco a poco... ma
più dire io non so
se vedevo una vela
o la spuma del mar.
La vela e il fazzoletto
si persero nel mare,
e piansero gli amici,
e piansi io con lor.
[Non piango la barchetta,
le vele io non piango,
ma piango la Biondina
che già in esilio va.
Non piango la barchetta
con le sue bianche vele,
ma quella ragazzina
con i biondi capel.]
le vele io non piango,
ma piango la Biondina
che già in esilio va.
Non piango la barchetta
con le sue bianche vele,
ma quella ragazzina
con i biondi capel.]
Langue: français
Μετέφρασε στα γαλλικά / Version française – LA BLONDINE – Marco Valdo M.I. - 2024
d’après la version italienne La Biondina de Riccardo Venturi – 2024
d’une chanson grecque – Ἡ Ξανθούλα – Dionysios Solomos / Διονύσιος Σολωμός – 1822-23
Paroles : Dionysios Solomòs
Musique : Nikolaos Mantzaros (Niccolò Manzaro)
Plusieurs fois, il m’est arrivé de dire que la Grèce, et je parle de la Grèce moderne, est le seul pays (à la seule et partielle exception de la France) qui a mis en musique et chanté ses plus grands poètes, pas peu souvent avec l'aide de ses plus grands musiciens. Celui-ci, qui compte parmi les poèmes les plus célèbres et les plus célébrés de Dionysios Solomós, est une exception : il a commencé, en fait, déjà comme chanson. Les vers, écrits par Solomos entre 1822 et 1823, étaient déjà prêts pour la musique composée par Nikolaos Mantzaros, ou Niccolò Manzaro (1795-1872). Corfiote, ou Corcirois, issu d'une famille gréco-italienne et totalement bilingue (comme d'ailleurs Solomos lui-même), il fut l'un des principaux compositeurs grecs du XIXe siècle et fondateur de l'école de musique dite « école de musique ionienne » (Επτανησιάκη Σχολή). Le « duo » formé par Solomos et Mantzaros a produit, entre autres, l’ Ὕμνος εἰς την Ἐλευθερίαν, l'« Hymne à la liberté », qui est l'hymne national hellénique.
Il se trouve que j'y ai pensé pas justement ce soir, à la « Xanthoula » de Solomòs, dans une note à la version italienne de Φεύγω μακριά πατρίδα μου. Ainsi, une dernière allusion presque en passant, « tant elle me paraissait évidente ». Le fait est que 'Xanthoula' appartient à ma préhistoire personnelle de l'apprentissage du grec moderne, quand un 'RV' de 15 ou 16 ans fouillait les bibliothèques et les librairies à la recherche de petits livres très étranges ; parmi eux, un manuel Hoepli décrépi de 1920, la 'Grammaire de la langue grecque moderne' d'un certain Romeo Lovera (un polyglotte qui écrivait de courtes grammaires de toutes les langues qu'il connaissait, et il y en avait pas mal). Parmi les lectures proposées dans le petit manuel, il y avait, pensez un peu, justement la Xanthoula de Solomos. Ne sachant absolument rien ni de la Blondine, ni du fait qu'il s'agissait déjà d'une chanson, l'adolescent RV s'est mis à la fredonner avec une musiquette de son invention, parce que la musique aide à l’apprentissage d’ un idiome. Je pense que, toutes ces années, le fantôme de Nikolaos Mantzaros est venu me poursuivre à mon insu ; je serais à présent capable de fredonner sa Xanthoula sur ma musiquette personnelle.
Il me semblait tellement évident qu'elle était là, la Xanthoula ; les fameux « Oublis des CCG », le « Parcours fantôme » qui ne verra jamais le jour. Naturellement, il n'y en avait aucune trace. Ben, il fallait bien qu'il y en ait une, car ce poème/chanson biséculaire a une histoire tout à fait particulière qui, je pense, mérite d'être racontée au moins pour les points principaux.
En Grèce, Dionysios Solomos est sans aucun doute le vate, le poète national. Sa poésie sous forme de chanson a une histoire de deux siècles entiers, au point d'entrer dans le répertoire de grands artistes contemporains tels que Dimitra Galani et Loukianos Kilaidonis ; mais déjà dans ses premiers temps, elle était devenue très fameuse. Un véritable voyage dans le temps parti de Zante et de Corfou. Mais la Xanthoula, la « Blondine » qui partait en terre étrangère (la ξενιτειά) n'était pas le fruit de l'imagination de Solomos, et était bel et bien partie pour des terres inconnues. Nous sommes dans les premières années de la Guerre d'Indépendance hellénique ; sur une autre île, loin de l’Ionie, advint le massacre de Chios. Avril 1822 : la résistance grecque aux troupes ottomanes stationnées sur l'île fait rage à Chios, et même les habitants des îles voisines accourent pour apporter leur aide. Un fort contingent de soldats ottomans débarque alors sur l'île, massacrant des milliers de personnes, suscitant l'indignation internationale. L'écho de cet épisode tragique, dans l'atmosphère de philhellénisme général de l'époque romantique, est tel qu'il conduit à un soutien croissant aux Grecs dans leur lutte pour l'indépendance. En 1824, Eugène Delacroix consacre son célèbre tableau au massacre de Chios. (Eugène Delacroix, Le Massacre de Chios, 1824, Paris, Musée du Louvre).
À Chios, il y eut environ vingt mille morts. Et des conséquences terribles : l'île ne s'en remis jamais plus. Les renforts obtenus par le commandant ottoman Nesuhzade Ali Pacha, arrivés à Chios le 22 mars 1822, s'élevaient à environ quarante mille hommes ; le 31 mars, l'ordre fut donné de brûler tous les villages de l'île. Les troupes ottomanes ont également reçu l'ordre strict de tuer tous les enfants de moins de trois ans, des deux sexes, et tous les hommes âgés de 12 ans et plus, ainsi que toutes les femmes âgées de 40 ans et plus, épargnant seulement ceux qui s'étaient convertis à l'islam. Vingt mille morts, et autour de vingt-trois mille exilés qui durent partir pour toujours en terre étrangère, dans la ξενιτειά. Parmi ces milliers d'exilés, il y avait Xanthoula, la Blondine.
C'était une jeune fille de Chios, de très noble maison. Aikaterini Mavrogordatou, âgée de treize ans, appartenait à une ancienne famille, qui est passée à l'histoire sous le nom italianisé de Maurocordato. Cette famille, originaire précisément de Chios, a par ailleurs connu une grande fortune dans l'Empire ottoman ; elle compte six princes de Valachie et de Moldavie, et même un chef d'État grec, Alexandre Maurocordato, qui a été président du Conseil exécutif entre 1822 et 1823. D’autres des Maurocordato s'installèrent à Zante, la patrie de Solomos ; par contre, la majorité s'installa à Livourne. Aikaterini et sa famille furent connues à Zante par Solomos, qui fut ému par l'aventure et l'exil de cette jeune fille aux traits délicats et aux yeux bleus expressifs et doux. Elle ne resta pas longtemps à Zante ; peu après, elle dut repartir, avec sa famille, pour des terres encore plus lointaines ; et Solomos alla la saluer lorsqu'elle monta sur la chaloupe qui devait l'emmener sur le bateau. De là naquit la « Xanthoula ».
L'histoire de la « Biondina » ne finit pas là. Grandie, elle s'établit à Londres où elle épousa Antonios Rallis, membre en exil d'une autre famille hellénique extrêmement noble dont de nombreux membres furent des personnalités de premier plan : chefs de cours suprêmes, premiers ministres (comme Dimitrios Rallis [1844-1821] et Ioannis Rallis [1878-1946], qui fut un premier ministre collaborationniste pendant l'occupation nazie-fasciste et qui mourut en prison pour cela, condamné à la perpétuité), et enfin Georgios Rallis, qui fut premier ministre grec au début des années 1980. Aikaterini Mavrogordatou vécut jusqu'à un âge avancé, devenant une vieille noble dame très aristocratique aux cheveux blancs. Elle vécut à Londres jusqu'à la fin de ses jours, mais elle reste dans l'histoire comme la Xanthoula qui échappa, jeune fille, avec sa famille, au massacre de Chios.
Sur la Xanthoula, le poème-chanson, dis-je, ont fleuri - comme il est pratiquement obligatoire dans un cas de ce genre – de véritables et réelles légendes. L'une d'entre elles, typiquement romantique, veut que Solomòs, dès qu'il vit la jeune fille, ait commencé à poétiser verbalement, en improvisant les six strophes. En réalité, le poème a occupé Solomòs pendant de longs mois, qui la « polit » jusqu'à ce qu'il ressemble à un poème improvisé et populaire. C'est ce qu'on appelle l'habileté poétique, et Solomòs en était grandement doté, rien à dire. Chanson populaire, à sa manière, elle est devenue populaire pour de vrai, avec tous les accidents de la vulgarisation (variantes, etc.). À un certain point de son histoire, apparurent deux strophes finales, jamais écrites par Solomòs (qui en avait écrit six, les authentiques). Après le (très beau) final, ces deux strophes ont été implantées (qui, par souci d'exhaustivité, sont données ici, entre crochets). Cette « coda » fallacieuse s'est tellement répandue que le philologue et érudit Iakovos Polylas les a incluses dans l’« Opera Omnia » de Solomos, publié en 1859, deux ans après sa mort. Il fallut un article d'Antonios S. Matesis, publié dans Ἑστία en 1891, pour rétablir la vérité ; depuis lors, la Xanthoula est jouée avec ses six strophes originales et authentiques. Pour trouver les fausses, j'ai dû recourir au petit livre de Romeo Lovera, qui donne les huit strophes. [RV].
Post scripta. Peu après le massacre de Chios, dans la nuit du 6 au 7 juin 1822, les forces helléniques sous le commandement de Konstantinos Kanaris attaquèrent le navire amiral de la flotte ottomane par vengeance. À ce moment, sur le grand navire se tenait une grande fête pour la fin du Ramadan. Kanaris attaqua le navire avec un brûlot qui atteignit la poudrière du navire amiral ; 2 000 Turcs périrent dans l'explosion et l'incendie, y compris le commandant Nasuhzade Ali Pacha lui-même.
Le Chiote Georgios Stravelakis, encore enfant au moment du massacre, fut capturé et converti à l'islam. Emmené en Turquie pour être vendu comme esclave, il réussit ensuite à s'émanciper et même à accéder à une grande notoriété : il fut nommé grand vizir de Tunis sous le nom de Mustapha Khaznadar, poste qu'il occupa de 1837 à 1873. Une histoire qui n'est peut-être pas sans rappeler celle de Sinàn Capudàn Pascià.
À propos, sur l'île de Chios a vécu historiquement une importante colonie génoise. À l'époque du massacre de Chios, on a calculé qu'environ 1/5 de la population de la grande île (située à très peu de distance de la côte d'Asie Mineure) était d'origine « latine », c'est-à-dire génoise.
En 2009, une copie du célèbre tableau de Delacroix fut donnée à l'île de Chios par le Louvre, pour être placée dans le musée local d'art byzantin. Suite à de vibrantes protestations de la part de la Turquie, en novembre de la même année, le tableau fut retiré du musée, malgré les protestations des Chiotes pour son retrait.
d’après la version italienne La Biondina de Riccardo Venturi – 2024
d’une chanson grecque – Ἡ Ξανθούλα – Dionysios Solomos / Διονύσιος Σολωμός – 1822-23
Paroles : Dionysios Solomòs
Musique : Nikolaos Mantzaros (Niccolò Manzaro)
Plusieurs fois, il m’est arrivé de dire que la Grèce, et je parle de la Grèce moderne, est le seul pays (à la seule et partielle exception de la France) qui a mis en musique et chanté ses plus grands poètes, pas peu souvent avec l'aide de ses plus grands musiciens. Celui-ci, qui compte parmi les poèmes les plus célèbres et les plus célébrés de Dionysios Solomós, est une exception : il a commencé, en fait, déjà comme chanson. Les vers, écrits par Solomos entre 1822 et 1823, étaient déjà prêts pour la musique composée par Nikolaos Mantzaros, ou Niccolò Manzaro (1795-1872). Corfiote, ou Corcirois, issu d'une famille gréco-italienne et totalement bilingue (comme d'ailleurs Solomos lui-même), il fut l'un des principaux compositeurs grecs du XIXe siècle et fondateur de l'école de musique dite « école de musique ionienne » (Επτανησιάκη Σχολή). Le « duo » formé par Solomos et Mantzaros a produit, entre autres, l’ Ὕμνος εἰς την Ἐλευθερίαν, l'« Hymne à la liberté », qui est l'hymne national hellénique.
Il se trouve que j'y ai pensé pas justement ce soir, à la « Xanthoula » de Solomòs, dans une note à la version italienne de Φεύγω μακριά πατρίδα μου. Ainsi, une dernière allusion presque en passant, « tant elle me paraissait évidente ». Le fait est que 'Xanthoula' appartient à ma préhistoire personnelle de l'apprentissage du grec moderne, quand un 'RV' de 15 ou 16 ans fouillait les bibliothèques et les librairies à la recherche de petits livres très étranges ; parmi eux, un manuel Hoepli décrépi de 1920, la 'Grammaire de la langue grecque moderne' d'un certain Romeo Lovera (un polyglotte qui écrivait de courtes grammaires de toutes les langues qu'il connaissait, et il y en avait pas mal). Parmi les lectures proposées dans le petit manuel, il y avait, pensez un peu, justement la Xanthoula de Solomos. Ne sachant absolument rien ni de la Blondine, ni du fait qu'il s'agissait déjà d'une chanson, l'adolescent RV s'est mis à la fredonner avec une musiquette de son invention, parce que la musique aide à l’apprentissage d’ un idiome. Je pense que, toutes ces années, le fantôme de Nikolaos Mantzaros est venu me poursuivre à mon insu ; je serais à présent capable de fredonner sa Xanthoula sur ma musiquette personnelle.
Il me semblait tellement évident qu'elle était là, la Xanthoula ; les fameux « Oublis des CCG », le « Parcours fantôme » qui ne verra jamais le jour. Naturellement, il n'y en avait aucune trace. Ben, il fallait bien qu'il y en ait une, car ce poème/chanson biséculaire a une histoire tout à fait particulière qui, je pense, mérite d'être racontée au moins pour les points principaux.
En Grèce, Dionysios Solomos est sans aucun doute le vate, le poète national. Sa poésie sous forme de chanson a une histoire de deux siècles entiers, au point d'entrer dans le répertoire de grands artistes contemporains tels que Dimitra Galani et Loukianos Kilaidonis ; mais déjà dans ses premiers temps, elle était devenue très fameuse. Un véritable voyage dans le temps parti de Zante et de Corfou. Mais la Xanthoula, la « Blondine » qui partait en terre étrangère (la ξενιτειά) n'était pas le fruit de l'imagination de Solomos, et était bel et bien partie pour des terres inconnues. Nous sommes dans les premières années de la Guerre d'Indépendance hellénique ; sur une autre île, loin de l’Ionie, advint le massacre de Chios. Avril 1822 : la résistance grecque aux troupes ottomanes stationnées sur l'île fait rage à Chios, et même les habitants des îles voisines accourent pour apporter leur aide. Un fort contingent de soldats ottomans débarque alors sur l'île, massacrant des milliers de personnes, suscitant l'indignation internationale. L'écho de cet épisode tragique, dans l'atmosphère de philhellénisme général de l'époque romantique, est tel qu'il conduit à un soutien croissant aux Grecs dans leur lutte pour l'indépendance. En 1824, Eugène Delacroix consacre son célèbre tableau au massacre de Chios. (Eugène Delacroix, Le Massacre de Chios, 1824, Paris, Musée du Louvre).
À Chios, il y eut environ vingt mille morts. Et des conséquences terribles : l'île ne s'en remis jamais plus. Les renforts obtenus par le commandant ottoman Nesuhzade Ali Pacha, arrivés à Chios le 22 mars 1822, s'élevaient à environ quarante mille hommes ; le 31 mars, l'ordre fut donné de brûler tous les villages de l'île. Les troupes ottomanes ont également reçu l'ordre strict de tuer tous les enfants de moins de trois ans, des deux sexes, et tous les hommes âgés de 12 ans et plus, ainsi que toutes les femmes âgées de 40 ans et plus, épargnant seulement ceux qui s'étaient convertis à l'islam. Vingt mille morts, et autour de vingt-trois mille exilés qui durent partir pour toujours en terre étrangère, dans la ξενιτειά. Parmi ces milliers d'exilés, il y avait Xanthoula, la Blondine.
C'était une jeune fille de Chios, de très noble maison. Aikaterini Mavrogordatou, âgée de treize ans, appartenait à une ancienne famille, qui est passée à l'histoire sous le nom italianisé de Maurocordato. Cette famille, originaire précisément de Chios, a par ailleurs connu une grande fortune dans l'Empire ottoman ; elle compte six princes de Valachie et de Moldavie, et même un chef d'État grec, Alexandre Maurocordato, qui a été président du Conseil exécutif entre 1822 et 1823. D’autres des Maurocordato s'installèrent à Zante, la patrie de Solomos ; par contre, la majorité s'installa à Livourne. Aikaterini et sa famille furent connues à Zante par Solomos, qui fut ému par l'aventure et l'exil de cette jeune fille aux traits délicats et aux yeux bleus expressifs et doux. Elle ne resta pas longtemps à Zante ; peu après, elle dut repartir, avec sa famille, pour des terres encore plus lointaines ; et Solomos alla la saluer lorsqu'elle monta sur la chaloupe qui devait l'emmener sur le bateau. De là naquit la « Xanthoula ».
L'histoire de la « Biondina » ne finit pas là. Grandie, elle s'établit à Londres où elle épousa Antonios Rallis, membre en exil d'une autre famille hellénique extrêmement noble dont de nombreux membres furent des personnalités de premier plan : chefs de cours suprêmes, premiers ministres (comme Dimitrios Rallis [1844-1821] et Ioannis Rallis [1878-1946], qui fut un premier ministre collaborationniste pendant l'occupation nazie-fasciste et qui mourut en prison pour cela, condamné à la perpétuité), et enfin Georgios Rallis, qui fut premier ministre grec au début des années 1980. Aikaterini Mavrogordatou vécut jusqu'à un âge avancé, devenant une vieille noble dame très aristocratique aux cheveux blancs. Elle vécut à Londres jusqu'à la fin de ses jours, mais elle reste dans l'histoire comme la Xanthoula qui échappa, jeune fille, avec sa famille, au massacre de Chios.
Sur la Xanthoula, le poème-chanson, dis-je, ont fleuri - comme il est pratiquement obligatoire dans un cas de ce genre – de véritables et réelles légendes. L'une d'entre elles, typiquement romantique, veut que Solomòs, dès qu'il vit la jeune fille, ait commencé à poétiser verbalement, en improvisant les six strophes. En réalité, le poème a occupé Solomòs pendant de longs mois, qui la « polit » jusqu'à ce qu'il ressemble à un poème improvisé et populaire. C'est ce qu'on appelle l'habileté poétique, et Solomòs en était grandement doté, rien à dire. Chanson populaire, à sa manière, elle est devenue populaire pour de vrai, avec tous les accidents de la vulgarisation (variantes, etc.). À un certain point de son histoire, apparurent deux strophes finales, jamais écrites par Solomòs (qui en avait écrit six, les authentiques). Après le (très beau) final, ces deux strophes ont été implantées (qui, par souci d'exhaustivité, sont données ici, entre crochets). Cette « coda » fallacieuse s'est tellement répandue que le philologue et érudit Iakovos Polylas les a incluses dans l’« Opera Omnia » de Solomos, publié en 1859, deux ans après sa mort. Il fallut un article d'Antonios S. Matesis, publié dans Ἑστία en 1891, pour rétablir la vérité ; depuis lors, la Xanthoula est jouée avec ses six strophes originales et authentiques. Pour trouver les fausses, j'ai dû recourir au petit livre de Romeo Lovera, qui donne les huit strophes. [RV].
Post scripta. Peu après le massacre de Chios, dans la nuit du 6 au 7 juin 1822, les forces helléniques sous le commandement de Konstantinos Kanaris attaquèrent le navire amiral de la flotte ottomane par vengeance. À ce moment, sur le grand navire se tenait une grande fête pour la fin du Ramadan. Kanaris attaqua le navire avec un brûlot qui atteignit la poudrière du navire amiral ; 2 000 Turcs périrent dans l'explosion et l'incendie, y compris le commandant Nasuhzade Ali Pacha lui-même.
Le Chiote Georgios Stravelakis, encore enfant au moment du massacre, fut capturé et converti à l'islam. Emmené en Turquie pour être vendu comme esclave, il réussit ensuite à s'émanciper et même à accéder à une grande notoriété : il fut nommé grand vizir de Tunis sous le nom de Mustapha Khaznadar, poste qu'il occupa de 1837 à 1873. Une histoire qui n'est peut-être pas sans rappeler celle de Sinàn Capudàn Pascià.
À propos, sur l'île de Chios a vécu historiquement une importante colonie génoise. À l'époque du massacre de Chios, on a calculé qu'environ 1/5 de la population de la grande île (située à très peu de distance de la côte d'Asie Mineure) était d'origine « latine », c'est-à-dire génoise.
En 2009, une copie du célèbre tableau de Delacroix fut donnée à l'île de Chios par le Louvre, pour être placée dans le musée local d'art byzantin. Suite à de vibrantes protestations de la part de la Turquie, en novembre de la même année, le tableau fut retiré du musée, malgré les protestations des Chiotes pour son retrait.
LA BLONDINE
J'ai vu Blondine, le soir,
Je l'ai vue tard,
Sur le bateau, monter
Pour partir à l'étranger.
L’air gonflait
Les blanches voiles ,
Comme une colombe,
Ses ailes, le voilier déployait.
Debout, ses amis se tenaient là,
Avec tristesse, avec joie,
Et elle, de son mouchoir,
Leur disait au revoir.
Et moi, je restai là dans ce soir
Pour regarder son salut
Tant que le loin, de le voir,
Ne me le permette plus.
La voile et le mouchoir
Se perdirent dans la mer,
Et les amis pleurèrent,
Et je mouillai mon mouchoir.
J'ai vu Blondine, le soir,
Je l'ai vue tard,
Sur le bateau, monter
Pour partir à l'étranger.
L’air gonflait
Les blanches voiles ,
Comme une colombe,
Ses ailes, le voilier déployait.
Debout, ses amis se tenaient là,
Avec tristesse, avec joie,
Et elle, de son mouchoir,
Leur disait au revoir.
Et moi, je restai là dans ce soir
Pour regarder son salut
Tant que le loin, de le voir,
Ne me le permette plus.
La voile et le mouchoir
Se perdirent dans la mer,
Et les amis pleurèrent,
Et je mouillai mon mouchoir.
[Le bateau, je ne pleure pas,
Les voiles, je ne pleure pas.
Blondine, je pleure tout bas
Qui là-bas en exil s'en va.
Pleurer le bateau, ses planches,
Ses voiles blanches ?
Non !, je pleure cette jeune fille
Aux cheveux blonds vanille].
Les voiles, je ne pleure pas.
Blondine, je pleure tout bas
Qui là-bas en exil s'en va.
Pleurer le bateau, ses planches,
Ses voiles blanches ?
Non !, je pleure cette jeune fille
Aux cheveux blonds vanille].
envoyé par Marco Valdo M.I. - 11/9/2024 - 19:42
Langue: anglais
English rewriting / Riscrittura inglese / Réécriture anglaise / Englanninkielinen uudelleenkirjoitus:
Riccardo Venturi, 12-9-2024 14:51
This is an an English rewriting rather than a version or a translation of Solomos’ song poem. “Rewriting” means that I’ve written all this as a personal English poem for Aikaterini Mavrogordatou, and -maybe- also for my salad days. This can be done only when a language is felt as a language of heart. Though in different ways, both Greek and English are languages deeply rooted in my heart. I don’t like English as a “world language” or a fake communication tool ready for massacre and nonexistence. I love English as a nude instrument of memory and history. [RV]
Riccardo Venturi, 12-9-2024 14:51
This is an an English rewriting rather than a version or a translation of Solomos’ song poem. “Rewriting” means that I’ve written all this as a personal English poem for Aikaterini Mavrogordatou, and -maybe- also for my salad days. This can be done only when a language is felt as a language of heart. Though in different ways, both Greek and English are languages deeply rooted in my heart. I don’t like English as a “world language” or a fake communication tool ready for massacre and nonexistence. I love English as a nude instrument of memory and history. [RV]
The Xanthoula
I saw that fair-haired maiden
At sunset in the dusk light,
Set her feet into a small boat
Leaving for foreign lands.
The milk-white sail was fill’d
With puffs of wind so sharp,
Like a white dove spreading
Her wings in the endless sky.
And all the friends stood there
In joy, yet sprinkled with pain;
She greeted them all waving
Her handkerchief in the air.
And I stood there glancing
To bid her my farewell,
Until the ship was so distant
And vanish’d in the sea.
The sail and the handkerchief
Diseappear’d on the main,
All the friends wept in sorrow,
So did I in bitter pain.
I saw that fair-haired maiden
At sunset in the dusk light,
Set her feet into a small boat
Leaving for foreign lands.
The milk-white sail was fill’d
With puffs of wind so sharp,
Like a white dove spreading
Her wings in the endless sky.
And all the friends stood there
In joy, yet sprinkled with pain;
She greeted them all waving
Her handkerchief in the air.
And I stood there glancing
To bid her my farewell,
Until the ship was so distant
And vanish’d in the sea.
The sail and the handkerchief
Diseappear’d on the main,
All the friends wept in sorrow,
So did I in bitter pain.
Caro Riccardo la tua presentazione della canzone è una vera e propria lezione di storia, quella con la S maiuscola ma anche la più significativa con la s minuscola. Per l'amore che dedichi alla canzone permettimi di dire che dalla morte di Michele Straniero nel 2000 in questi ultimi 24 anni siete tu e gli altri amici di AWG i nuovi "canta cronache".
Paolo Rizzi - 12/9/2024 - 10:44
@ Paolo Rizzi
Io ti ringrazio davvero immensamente per le tue parole, a nome mio personale e di tutto il sito. Un paragone con Michele L. Straniero e con Cantacronache fa decisamente girare la testa; casomai, si potrebbe dire, noialtri siamo degli "Scrivicronache". Se ci mettessimo a cantarle, temo che ci sparerebbero all'istante. Però è pur vero che tutto questo sito è un luogo di cronaca, di storie e di Storia, con tutte le maiuscole e le minuscole di prammatica.
A tale riguardo, visto che in questa pagina se ne parla, vorrei farti vedere la mia "antica" fonte per la Xanthoula. Ho ritirato fuori appositamente il vecchio manuale Hoepli del 1920, la "Grammatica della lingua greca moderna", debitamente spolverato e liberato dal cadavere di un ragno che vi stazionava chissà da quanto:
E qui la Xanthoula:
Naturalmente, occorre sorvolare su diversi fatti, compreso un refuso di stampa (c’è scritto παντίλι al posto di μαντίλι, il che mi ha fatto continuare imperterrito a cantare “pandìli” -che non significa nulla- fino ai giorni nostri). Sorvoliamo specialmente sul fatto che la musichetta di mia invenzione non era fatta solo per imparare meglio il greco moderno, ma anche e soprattutto per cantarla ad una reale biondina, coi regolari occhioni sognanti e capelli lunghissimi e ricci, vale a dire una compagna di classe di cui ero follemente innamorato e che, ovviamente, non mi si filava manco di striscio (e la capisco, visto l’aspetto neanderthaliano che avevo da adolescente, i capellacci unti e l’odore che emanavo). Insomma, un vero e proprio viaggio nel tempo, anche nel mio...
Era la primavera del 1978.
Io ti ringrazio davvero immensamente per le tue parole, a nome mio personale e di tutto il sito. Un paragone con Michele L. Straniero e con Cantacronache fa decisamente girare la testa; casomai, si potrebbe dire, noialtri siamo degli "Scrivicronache". Se ci mettessimo a cantarle, temo che ci sparerebbero all'istante. Però è pur vero che tutto questo sito è un luogo di cronaca, di storie e di Storia, con tutte le maiuscole e le minuscole di prammatica.
A tale riguardo, visto che in questa pagina se ne parla, vorrei farti vedere la mia "antica" fonte per la Xanthoula. Ho ritirato fuori appositamente il vecchio manuale Hoepli del 1920, la "Grammatica della lingua greca moderna", debitamente spolverato e liberato dal cadavere di un ragno che vi stazionava chissà da quanto:
E qui la Xanthoula:
Naturalmente, occorre sorvolare su diversi fatti, compreso un refuso di stampa (c’è scritto παντίλι al posto di μαντίλι, il che mi ha fatto continuare imperterrito a cantare “pandìli” -che non significa nulla- fino ai giorni nostri). Sorvoliamo specialmente sul fatto che la musichetta di mia invenzione non era fatta solo per imparare meglio il greco moderno, ma anche e soprattutto per cantarla ad una reale biondina, coi regolari occhioni sognanti e capelli lunghissimi e ricci, vale a dire una compagna di classe di cui ero follemente innamorato e che, ovviamente, non mi si filava manco di striscio (e la capisco, visto l’aspetto neanderthaliano che avevo da adolescente, i capellacci unti e l’odore che emanavo). Insomma, un vero e proprio viaggio nel tempo, anche nel mio...
Era la primavera del 1978.
Riccardo Venturi - 12/9/2024 - 11:49
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[1822/23]
Στίχοι / Testo / Lyrics / Paroles / Sanat: Dionysios Solomòs
Μουσική / Musica / Music / Musique / Sävel: Nikolaos Mantzaros (Niccolò Manzaro)
Parecchie volte mi è capitato di dire che la Grecia, e parlo della Grecia moderna, è l’unico paese (con la sola e parziale eccezione della Francia) che ha messo in musica e cantato i suoi più grandi poeti, non di rado con l’ausilio dei suoi più grandi musicisti. Questa, che è tra le più celebri e celebrate poesie di Dionysios Solomòs, rappresenta un’eccezione: è nata, infatti, già come canzone. I versi, scritti da Solomòs tra il 1822 e il 1823, erano già pronti per la musica composta da Nikolaos Mantzaros, o Niccolò Manzaro (1795-1872). Corfiota, o corcirese, di famiglia greco-italiana e totalmente bilingue (come, del resto, Solomòs stesso), fu tra i maggiori compositori greci del XIX secolo e fondatore della cosiddetta “Scuola musicale Ionica” (Επτανησιάκη Σχολή). Il “duo” formato da Solomòs e Mantzaros produsse, tra le altre cose, l’ Ὕμνος εἰς την Ἐλευθερίαν, l’ “Inno alla Libertà” che è l’inno nazionale Ellenico.
Mi era successo di ripensarci proprio stasera alla “Xanthoula” di Solomòs, in una nota alla versione italiana di Φεύγω μακριά πατρίδα μου. Così, un accenno finale quasi di sfuggita, “tanto mi pareva ovvio”. Il fatto è che la “Xanthoula” appartiene alla mia personale preistoria dell’apprendimento del greco moderno, quando un quindici o sedicenne “RV” rovistava in biblioteche e librerie alla ricerca di libriccini strani assai; tra i quali un decrepito manuale Hoepli del 1920, la “Grammatica della lingua greca moderna” di tale Romeo Lovera (un poliglotta che scriveva brevi grammatiche di ogni lingua che conosceva, ed erano parecchie). Tra le letture proposte nel manualetto c’era, si pensi un po’, proprio la Xanthoula di Solomòs. Non sapendone assolutamente niente, né della Biondina, né del fatto che si trattava già di una canzone, il RV adolescente prese a canticchiarsela con una musichetta di sua invenzione, perché la musica aiuta l’apprendimento di un idioma. Penso che, in tutti questi anni, il fantasma di Nikolaos Mantzaros mi sia venuto a perseguitare a mia insaputa; sarei tuttora capace di canticchiare la sua Xanthoula sulla mia musichetta personale.
Tanto mi pareva ovvio che ci fosse, la Xanthoula; le famosissime “Dimenticanze delle CCG”, il “percorso fantasma” (Ghost Song Itinerary) che non verrà mai alla luce. Naturalmente, non ve n’era traccia. Beh, ci doveva essere, perché questa bisecolare poesia/canzone ha una storia del tutto particolare che, credo, meriti di essere raccontata almeno per sommi capi.
In Grecia, Dionysios Solomòs è senz’altro il vate, il poeta nazionale. Questa sua poesia in forma di canzone ha un percorso di due secoli interi, fino ad essere entrata nel repertorio di grandi artisti contemporanei come Dimitra Galani e Loukianos Kilaidonis; ma già nei suoi primi tempi era diventata famosissima. Un vero e proprio viaggio nel tempo partito da Zante e da Corfù. Ma la Xanthoula, la “Biondina” che parte per andare in terra straniera (la ξενιτειά) non era un frutto dell’immaginazione di Solomòs, ed era davvero partita per andare in terre sconosciute. Siamo nei primi anni della Guerra d’Indipendenza ellenica; in un’altra isola, lontana dalle Ionie, avvenne il Massacro di Chio. Aprile 1822: a Chio infuria la resistenza dei greci alle truppe ottomane di stanza sull’isola, ed accorrono anche gli abitanti delle isole vicine per dare man forte. Un forte contingente di soldati ottomani sbarcò quindi sull’isola massacrando migliaia di persone, suscitando l’indignazione internazionale. Tale fu l’eco di quel tragico episodio, nell’atmosfera di generale filellenismo dell’epoca romantica, da portare ad un sempre maggiore supporto ai greci nella lotta per l’indipendenza. Nel 1824, Eugène Delacroix dedicò al massacro di Chio un suo celebre dipinto:
A Chio si ebbero circa ventimila morti. E delle conseguenze terribili: l’isola non si riprese mai più. I rinforzi di truppe ottenuti dal comandante ottomano Nesuhzade Ali Pascià, giunti a Chio il 22 marzo 1822, ammontavano a circa quarantamila uomini; il 31 marzo giunse l’ordine di bruciare ogni villaggio dell’isola. Le truppe ottomane avevano l’ordine tassativo di uccidere anche tutti i bambini di età inferiore ai tre anni, di entrambi i sessi, e tutti i maschi dai 12 anni in su, oltre a tutte le donne dai 40 anni in su, risparmiando soltanto coloro che si fossero convertiti all’Islam. Ventimila morti; e circa ventitremila esiliati che dovettero partire per sempre in terra straniera, nella ξενιτειά. Tra queste migliaia di esiliati, c’era la Xanthoula, la Biondina.
Era una ragazzina di Chio, di nobilissimo casato. La tredicenne Aikaterini Mavrogordatou apparteneva ad un’antica famiglia, che è passata alla storia con il nome italianizzato di Maurocordato. La famiglia, originaria proprio di Chio, ottenne peraltro grandi fortune proprio nell’Impero Ottomano; conta sei tra prìncipi di Valacchia e di Moldavia, ed anche un capo di stato greco, Alessandro Maurocordato, che fu presidente del Consiglio Esecutivo proprio tra il 1822 e il 1823. Diversi dei Maurocordato si stabilirono a Zante, la patria di Solomòs; la maggior parte si stabilirono invece a Livorno. Aikaterini e la sua famiglia furono conosciuti a Zante da Solomòs, che si commosse per l’avventura e per l’esilio della ragazzina, minuta, coi lineamenti delicati ed occhi azzurri espressivi e dolci. A Zante non rimase molto; poco dopo dovette ripartire, assieme alla sua famiglia, per terre ancora più lontane; e Solomòs andò a salutarla mentre saliva sulla scialuppa che l'avrebbe portata alla nave. Da qui nacque la “Xanthoula”.
La storia della “Biondina” non finisce qui. Cresciuta, si stabilì a Londra dove sposò Antonios Rallis, membro in esilio di un’altra oltremodo nobile famiglia ellenica molti dei cui membri furono personalità assai in vista: capi di corti supreme, primi ministri (come Dimitrios Rallis [1844-1821] e Ioannis Rallis [1878-1946], che fu primo ministro collaborazionista durante l’occupazione nazifascista e che per questo morì in carcere, condannato all’ergastolo), per arrivare a Georgios Rallis, che fu primo ministro greco nei primi anni 1980. Aikaterini Mavrogordatou visse fino a tarda età, diventando un’assai aristocratica vecchia nobildonna dai capelli bianchi. Visse a Londra fino alla fine dei suoi giorni; ma nella storia rimane come la Xanthoula che fuggì ragazzina, assieme alla sua famiglia, dal massacro di Chio.
Sulla Xanthoula, la poesia-canzone dico, sono fiorite -come è praticamente d’obbligo in un caso del genere- delle vere e proprie leggende. Una di queste, tipicamente romantica, vuole che Solomòs, non appena vista la ragazzina, si sia messo a poetare a voce improvvisando le sei strofe. In realtà, la poesia occupò Solomòs per lunghi mesi, che la “limò” fino a darle l’aspetto di una poesia improvvisata e popolare. Si chiama abilità poetica, e Solomòs ne era grandemente provvisto, nulla da dire. Canzone popolare, a modo suo, lo è divenuta per davvero, con tutti gli accidenti della popolarizzazione (varianti ecc.). Ad un certo punto della sua storia, comparvero due strofe finali, mai scritte da Solomòs (che ne aveva scritte sei, quelle autentiche). Dopo il (bellissimo) finale, furono impiantate queste due strofe (che, per completezza, si riportano nel testo qui dato, tra parentesi quadre). Questa “coda” spuria si diffuse talmente tanto, che il filologo e studioso Iakovos Polylas le incluse nell’ “Opera Omnia” di Solomos pubblicato nel 1859, due anni dopo la sua morte. Occorse un articolo di Antonios S. Matesis, pubblicato su Ἑστία nel 1891, per ristabilire la verità; da allora la Xanthoula viene eseguita con le sue sei strofe originarie e autentiche. Per ritrovare quelle spurie ho dovuto ricorrere proprio al libriccino di Romeo Lovera, che le dà tutte e otto. [RV]
Post scripta. Poco dopo il massacro di Chio, nella notte tra il 6 e il 7 giugno 1822, le forze elleniche al comando di Konstantinos Kanaris attaccarono la nave ammiraglia della flotta ottomana come vendetta. In quel momento, sulla grossa nave si stava tenendo una grande festa per la fine del Ramadan. Kanaris attaccò la nave con un brulotto, che raggiunse la polveriera dell’ammiraglia; nell’esplosione e nell’incendio perirono 2000 turchi, tra cui lo stesso comandante Nasuhzade Ali Pascià.
Il chiota Georgios Stravelakis, all’epoca del massacro un ragazzo, fu catturato e convertito all’Islam. Portato in Turchia per essere venduto come schiavo, riuscì poi ad emanciparsi ed a raggiungere addirittura una grande prominenza: fu nominato Gran Visir di Tunisi col nome di Mustapha Khaznadar, carica che tenne dal 1837 al 1873. Una vicenda che, forse, ricorda un po’ quella di Sinàn Capudàn Pascià.
A proposito: nell’isola di Chio è vissuta storicamente una grossa colonia genovese. All’epoca del massacro di Chio, si è calcolato che circa 1/5 della popolazione della grossa isola (situata a brevissima distanza dalle coste dell’Asia Minore) fosse di origine “latina”, cioè genovese.
Nel 2009, una copia del celebre dipinto di Delacroix fu donata all’isola di Chio dal Louvre, per essere sistemata nel locale museo d’arte bizantina. Ciò suscitò vibrate proteste da parte della Turchia; nel novembre dello stesso anno, il dipinto fu ritirato dal museo, nonostante le proteste dei chioti per la sua rimozione.