Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Nous partons en ballade,
À la fête d'Argenteuil, ah, ah !
Le petit bleu camarade,
Va nous taper dans l’œil, ah, ah !
Vous êtes comme moi sans doute,
Avant de faire la malle,
Je casserais bien une croûte,
En buvant un guindal.
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Mon vieux propriétaire,
Est l' modèle du quartier, ah, ah !
Jamais de ses locataires,
Il n'augmente le loyer, ah, ah !
Le dimanche il nous mène,
Tous chez le marchand de vin,
Et chante à perdre haleine,
Avec nous ce refrain :
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Dans ce soir de ripaille,
Deux copains sont tombés, ah, ah !
Mais avant qu'ils s'en aillent,
L'un d'eux se met à crier : ah, ah !
Allez la tenancière,
Apportez le litron, ah, ah !
Une goutte, c'est la dernière,
Ma vieille, et nous partons.
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Je suis matérialiste,
Et avant qu'il fasse jour, ah, ah!
Je dois à l'improviste,
Retrouver mes amours, ah, ah !
Adieu les camarades,
Mais avant de nous quitter,
Je vous offre une rasade,
Voulez-vous accepter :
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Nous partons en ballade,
À la fête d'Argenteuil, ah, ah !
Le petit bleu camarade,
Va nous taper dans l’œil, ah, ah !
Vous êtes comme moi sans doute,
Avant de faire la malle,
Je casserais bien une croûte,
En buvant un guindal.
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Mon vieux propriétaire,
Est l' modèle du quartier, ah, ah !
Jamais de ses locataires,
Il n'augmente le loyer, ah, ah !
Le dimanche il nous mène,
Tous chez le marchand de vin,
Et chante à perdre haleine,
Avec nous ce refrain :
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Dans ce soir de ripaille,
Deux copains sont tombés, ah, ah !
Mais avant qu'ils s'en aillent,
L'un d'eux se met à crier : ah, ah !
Allez la tenancière,
Apportez le litron, ah, ah !
Une goutte, c'est la dernière,
Ma vieille, et nous partons.
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
Je suis matérialiste,
Et avant qu'il fasse jour, ah, ah!
Je dois à l'improviste,
Retrouver mes amours, ah, ah !
Adieu les camarades,
Mais avant de nous quitter,
Je vous offre une rasade,
Voulez-vous accepter :
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en route ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train.
Ceux qui voudront s'en aller s'en iront,
Ceux qui voudront rester resteront.
envoyé par Marco Valdo M.I. - 16/12/2023 - 18:20
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Chanson française - Encore un petit Verre de Vin – anonyme – circa 1914 – 1915
Pierre Albert Leroux - circa 1920
Voici, Lucien l’âne mon ami, une chanson française populaire, réputée « chanson à boire » - et elle l’est ; mais je suis absolument sûr qu’elle a eu un tout autre sens du côté de Verdun et autres lieux du genre entre 1914 et 1918.
Ah, oui !, s’étonne Lucien l’âne, et comment tu sais ça et comment tu peux en être si sûr.
Tout simplement à cause de ma grand-mère, réplique Marco Valdo M.I., qui la chantait souvent quand j’étais enfant. J’ai encore dans l’oreille ce refrain qu’elle fredonnait comme ça :
Pour nous mettre en rou-ou-ou-ou - te ;
Encore un petit verre de vin,
Pour nous mettre en train. »
Oui, dit Lucien l’âne, d’une voix ironique et nettement sceptique, mais encore ?
Oh, Lucien l’âne mon ami, quand elle me chantait ça, évidemment, vu que c’était ma grand-mère et que ma mère était son quatrième enfant, c’était une adorable vieille dame – du moins, à mes yeux de gamin – et très joyeuse avec ça. Ce qui explique mon respect pour les grands-mères, même quand elles sont d’un ennui considérable. Elle l’est restée jusqu’à bien tard, quarante ans plus tard et quand ça la prenait, elle chantait encore :
Pour nous mettre en rou-ou-ou-ou - te... »
Par contre, son mari, un vrai brabançon bruxellaire, même s’il avait fini dans ses bras dans un hôpital à l’arrière du front, ne la connaissait – cette chanson – que par ouï-dire et ne la chantait pas. Et pourquoi ?
Oui, dit Lucien l’âne, pourquoi ? Je me demande quelle est la clé de ce mystère ?
C’est tout simple, dit Marco Valdo M.I., ça tient à l’Histoire de cette époque et de cette partie de la France – je veux dire la Champagne et les régions voisines. C’était une chanson du terroir français et elle était d’autant plus populaire qu’on donnait aux soldats leur ration de vin avant de les envoyer au casse-pipe - le vin est l’opium du peuple; mon grand-père, lui, il était belge ; en Belgique, la boisson populaire était la bière, pas le vin. Donc, on était en ce temps-là, entre 1914 et 1918, un peu occupé à se lancer des obus, des bombes et des balles sur la gueule. En fait, je devrais dire : les hommes étaient occupés à… Ma grand-mère, une jeune fille, née un peu avant le siècle, était la treizième enfant d’un berger champenois, de surcroît transhumant vers les Vosges. La guerre venue, elle s’est engagée comme garde-malade, aide-soignante, infirmière, que sais-je ?, dans les hôpitaux militaires. Il y avait d’ailleurs de quoi faire, on recrutait à tour de bras. Elle a donc passé la guerre avec les poilus en morceaux, à laver, soigner, consoler ces gueules cassées. C’est là qu’elle a :
1. appris la vie, quoiqu’elle devait déjà en savoir un bout – les agneaux, ça meurt aussi.
2. su ce qu’étaient les hommes ;
3. entendu et retenu leurs chansons et leurs expressions – fussent-elles les plus crues, les plus paillardes. C’est elle qui disait quand ça pressait : « Change pas de main, je sens que ça vient ! », quand elle croyait que je ne comprenais pas. Après, quand elle a compris que je comprenais, elle a continué en me faisant un clin d’œil.
4. rencontré et épousé mon grand-père, qui l’a importée en Belgique après la fin des hostilités. Ils se marièrent et eurent 5 enfants.
Donc, ma grand-mère avait fait ses universités avec les poilus, des gens qui ne gardaient pas leur langue dans leur poche. J’imagine aussi leurs mains, quand ils en avaient encore.
Oh, dit Lucien l’âne, dans un pareil bazar, on ne voit pas les choses de la même façon que dans une salle de classe, un salon où on cause, un catéchisme ou un confessionnal, sauf peut-être dans celui de Jean Meslier (Il testamento del parroco Meslier) ou d’autres curés comme lui qui avaient appris de la vie – encore elle – bien des choses et bien des compassions. La vie en territoires de guerre de souffrances n’a pas les mêmes repères. La morale ordinaire en prend un coup et l’empathie a de ces tolérances, larges, mais aux limites fermement précisées. C’est toute l’histoire aussi de Quand Madelon….
Donc, encore, pour conclure, reprend Marco Valdo M.I., cette « chanson à boire » était aussi une grande chanson du désespoir, à double sens – au moins. Voyez ce passage et sa légère adaptation :
Ceux qui voudront rester resteront…
et l’adaptation :
Ceux qui pourront rester resteront. »
Comme on le sait, ils furent des millions à « devoir s’en aller ». Heureusement pour moi, ma bonne grand-mère et mon bon-papa furent de ceux qui ont pu rester.
Eh bien voilà, dit Lucien l’âne, on en restera là. Et puis, tissons le linceul de ce vieux monde (tout ça, c’était déjà il y a plus d’un siècle) dément, autodestructeur, résilient malgré tout et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane