La ville est là-devant, taquine.
Arrêtez de fumer, dit le Lieutenant.
On traverse le champ de mines.
Celui qui passe devant
A des chances. En avant !
On part à l’attaque en courant.
À l’arrière, les mitrailleuses crépitent.
On fonce vers l’ennemi.
Le lieutenant pousse un cri.
Dans la boue, tous on se précipite.
Le Lieutenant se lève et retombe.
Et pour toujours, il succombe.
Parler est ma vocation,
Ma principale occupation.
Une activité pas si futile,
En fait, parler est très utile.
Parler, c’est penser à haute voix,
Éclairer la conscience des gens,
Comme le faisaient autrefois
Les aèdes, les comédiens itinérants,
Les simples d’esprit et les bouffons.
En Zinovie, parler reste au fond
Le meilleur moyen de communication
Et la commune distraction.
La ville violée s’était vidée ;
Nous, on se sent vraiment étrangers.
Dans les maisons abandonnées,
On cherche de quoi manger.
Des milliers partis à l’assaut,
Quelques dizaines sont restés debout.
Les autres ont fait le grand saut,
Et sont restés couchés dans la boue.
En haut, il va y avoir des médailles,
Des titres et de l’avancement.
Nous autres, la piétaille
On rêve de dormir tranquillement.
Pour la Fête, ils vont défiler
Par quatre de front, au pas cadencé.
La ville ravagée, dans ses ruines,
Sa voix voilée chantera sa comptine.
La Lune éclairera cette misère
Durant tous ses prochains quartiers ;
La ville pleurera sa colère
Dans tous ses quartiers.
La ville par la guerre vidée,
La ville par les soldats violentée,
La ville renfilera sa robe violette,
La ville mettra sa voilette.
Arrêtez de fumer, dit le Lieutenant.
On traverse le champ de mines.
Celui qui passe devant
A des chances. En avant !
On part à l’attaque en courant.
À l’arrière, les mitrailleuses crépitent.
On fonce vers l’ennemi.
Le lieutenant pousse un cri.
Dans la boue, tous on se précipite.
Le Lieutenant se lève et retombe.
Et pour toujours, il succombe.
Parler est ma vocation,
Ma principale occupation.
Une activité pas si futile,
En fait, parler est très utile.
Parler, c’est penser à haute voix,
Éclairer la conscience des gens,
Comme le faisaient autrefois
Les aèdes, les comédiens itinérants,
Les simples d’esprit et les bouffons.
En Zinovie, parler reste au fond
Le meilleur moyen de communication
Et la commune distraction.
La ville violée s’était vidée ;
Nous, on se sent vraiment étrangers.
Dans les maisons abandonnées,
On cherche de quoi manger.
Des milliers partis à l’assaut,
Quelques dizaines sont restés debout.
Les autres ont fait le grand saut,
Et sont restés couchés dans la boue.
En haut, il va y avoir des médailles,
Des titres et de l’avancement.
Nous autres, la piétaille
On rêve de dormir tranquillement.
Pour la Fête, ils vont défiler
Par quatre de front, au pas cadencé.
La ville ravagée, dans ses ruines,
Sa voix voilée chantera sa comptine.
La Lune éclairera cette misère
Durant tous ses prochains quartiers ;
La ville pleurera sa colère
Dans tous ses quartiers.
La ville par la guerre vidée,
La ville par les soldats violentée,
La ville renfilera sa robe violette,
La ville mettra sa voilette.
inviata da Marco Valdo M.I. - 2/5/2022 - 20:39
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Chanson française – La Ville violée – Marco Valdo M.I. – 2022
LA ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre, dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son abondante littérature.
Épisode 1 : Actualisation nationale ; Épisode 2 : Cause toujours ! ; Épisode 3 : L’Erreur fondamentale ; Épisode 4 : Le Paradis sur Terre ; Épisode 5 : Les Héros de l’Histoire ; Épisode 6 : L’Endémie ; Épisode 7 : La Réalité ; Épisode 8 : La Carrière du Directeur ; Épisode 9 : Vivre en Zinovie ; Épisode 10 : Le But final ; Épisode 11 : Les nouveaux Hommes ; Épisode 12 : La Rédaction ; Épisode 13 : Glorieuse et grandiose Doussia ; Épisode 14 : Le Bataillon des Suicidés ; Épisode 15 : Les Gens ; Épisode 16 : Jours tranquilles au Pays ; Épisode 17 : La Région ; Épisode 18 : Mémoires d’un Rat militaire ; Épisode 19 : L’inaccessible Rêve ; Épisode 20 : La Gastronomie des Étoiles ; Épisode 21 : Le Progrès ; Épisode 22 : Faire ou ne pas faire ; Épisode 23 : Le Bonheur des Gens ; Épisode 24 : La Sagesse des Dirigeants ; Épisode 25 : Les Valeurs d’Antan ; Épisode 26 : L’Affaire K. ; Épisode 27 : L’Atmosphère ; Épisode 28 : La Nénie de Zinovie ; Épisode 29 : L’Exposition colossale ; Épisode 30 : La Chasse aux Pingouins ; Épisode 31 : Le Rêve et le Réel ; Épisode 32 : La Vérité de l'État ; Épisode 33 : La Briqueterie ; Épisode 34 : L’Armée des Chefs ; Épisode 35 : C’est pas gagné ; Épisode 36 : Les Trois’z’arts ; Épisode 37 : La Porte fermée ; Épisode 38 : Les Puces ; Épisode 39 : L’Ordinaire de la Guerre ;
Épisode 40
Varvara Grankova - s.d.
La ville violée, dit Lucien, c’est étrange comme les histoires de Zinovie font penser à certaine actualité, comme la Zinovie ressemble dans ses manières à un pays voisin de l’Ukraine.
Il n’y a rien là de bien étonnant, répond Marco Valdo M.I., puisque la Zinovie est ce même pays, mais vu de l’intérieur par cette chronique, tirée des écrits d’un de ses habitants ; j’ajouterais un de ses habitants les plus conscients, un de ses habitants qui aimait la logique et la vérité, qui cherchait à comprendre et à faire comprendre l’absurde comportement général de son pays. En fait, ce qu’il décrit là est le fondement commun à la Zinovie et à son modèle ; l’une est le reflet de l’autre et vice-versa. La Zinovie est un tableau réaliste et même, hyperréaliste. Ce qui est stupéfiant, c’est que des années sont passées et qu’on aurait pu croire ce passé passé. Il n’en est rien, il a fallu que tout change pour que rien ne change aurait conclu Tancrède.
On aurait, dit Lucien l’âne, à propos de l’histoire présente, dû comprendre l’avertissement que lançait l’écrivain allemand Bertolt Brecht : « Et le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde », même qu’il faudrait réécrire sa pièce sous le titre : « La résistible ascension de Clodomir Foutine ». Il suffirait de remplacer le chou-fleur par le gaz. Si tu en avais le temps, ce serait une bonne idée de le faire.
Le temps, le temps, rien que ça, Lucien l’âne mon ami, car tu penses que nous avons le temps. Enfin, passons. Maintenant, à propos de théâtre, et avant d’en revenir à la chanson, je voudrais te faire connaître un petit bout de ma version française, du discours d’Henry V roi d’Angleterre au gouverneur d’Harfleur, ville française qu’il assiège :
« Comment décide maintenant le gouverneur de la ville ? Ceci est le dernier pourparler que nous admettrons… Prenez pitié de votre ville… sinon vous allez voir l’aveugle et sanguinaire soldat, de sa main sale défaire les tresses de vos filles aux cris aigus, vos pères tirés par leur barbe grise et leurs très révérendes têtes écrasées contre les murs, vos petits enfants nus plantés sur des piques… Que dites-vous ? Vous rendez-vous et évitez ça ou, coupables de défense, vous serez alors détruits ? » (William Shakespeare, henry V, Acte III, scène III).
Oui, dit Lucien l’âne, Shakespeare en savait un bout sur la folie sanglante des puissants. Qu’en est-il, à présent, du reste de la chanson ?
En gros, répond Marco Valdo M.I., elle raconte la prise de la ville et le futur défilé de la victoire que feront les vainqueurs sur la grand place de la ville – enfin, ceux qui ont survécu loin des combats, ornés de leurs médailles et fiers de leur promotion et la ville pour ne pas les voir mettra sa voilette.
La ville renfilera sa robe violette,
La ville vide mettra sa voilette.
Je vois, dit Lucien l’âne, une ambiance de coma. Parfois, les villes s’en remettent, parfois, elles ne s’en remettent pas comme le fit Troie. Ici, l’avenir nous le dira. En attendant, tissons le linceul de ce vieux monde héroïque, grandiose, attardé, crétin, barbare, et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane