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La Résurrection

Marco Valdo M.I.
Langue: français



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La Résurrection

Chanson française – La Résurrection – Marco Valdo M.I. – 2020

ARLEQUIN AMOUREUX – 44

Opéra-récit historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola « Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J. Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez Flammarion à Paris en 1979.

Dialogue Maïeutique

Arlequin et la mort Somov 1907


Que voilà un titre bien réjouissant !, s’exclame Lucien l’âne en riant.

Oui, répond un Marco Valdo M.I. faussement sinistre, surtout en ces temps morbides et hypocondriaques que nous vivons, où par avance, tous se croient malades et grandement souffrants. D’autant plus que la quarantaine, qui confinera bientôt toute la planète en elle-même, ne pourrait nous effrayer grandement, nous qui vivons habituellement en retrait dans notre réserve indienne de Wallonie. Les rassemblements, les regroupements, les entassements, les attroupements et toutes ces sortes de choses, bref, le troupeau : très peu pour nous.

Tout comme d’ailleurs, prolonge Lucien l’âne, les abois, les brouhahas et les tracas ne sont pas pour moi, ne me vont pas. Mais enfin, quand même, par les temps qui courent, une résurrection, ça ne se refuse pas. On pourrait même dire que c’est une bonne nouvelle. Mais au fait, quelle est-elle ? De quoi s’agit-il très exactement ?

De quoi s’agit-il très exactement ?, Lucien l’âne mon ami, je m’en vais te le dire en te renvoyant à la chanson elle-même, qui te le dit dès le début :

« Eine ganz neue Pantomime mit Harlekin. »
(Toute une pantomime avec Arlequin)

Voilà ce que c’est cette résurrection, en quoi, tu le conviendras, elle ne se distingue aucunement de toutes les autres. En réalité, tout fantasmagorique et baroque qu’elle est, elle décrit son irréelle réalité.

D’accord, j’entends bien, Marco Valdo M.I. ; mais dis-moi de quel irréel réel tu parles ?

Oh moi ?, je ne parle de rien, répond Marco Valdo M.I. ; c’est la chanson qui raconte et philosophe. Elle raisonne et dévoile le mystère de la résurrection en général ; je veux dire, en dévoilant le sien, elle dévoile le mystère de toutes les autres. En fait, c’est un peu la description méticuleuse du phénomène.

Oui, c’est une bonne chose, approuve Lucien l’âne, que de lever le voile sur cette histoire de résurrection qui m’a toujours semblé suspecte. Je l’ai toujours tenue pur une histoire de charlatan, pas une blague, mais une véritable escroquerie intellectuelle juste capable d’abuser ceux qui veulent y croire.

Certes, dit Marco Valdo M.I., mais pur la chanson, la chose est plus subtile. Je résume en considérant que les trois parties de la chanson sont trois actes d’une pièce de théâtre jouée par la petite troupe de Matěj Kuře, alias Matthias, Sevastiano, Andrea, etc., dans le théâtre de verdure qu’elle s’est improvisé dans la grotte de la marnière. Donc, l’acte I voit la nécessaire mort d’Arlequin.

Nécessaire ?, s’étonne Lucien l’âne.

Mais oui, Lucien l’âne mon ami, c’est logique. Arlequin doit absolument mourir au premier acte, car sinon comment pourra-t-il ressusciter ?

En effet, dit Lucien l’âne, c’est logique : il faut mourir, si l’on veut ressusciter. Ainsi, on ne ressuscitera jamais. Et puis ?

Et puis, Lucien l’âne mon ami, c’est le deuxième acte où les compagnons du défunt (Pierrot et Pantalon et même le Docteur Faust) s’affairent à vouloir contrarier la mort. Deux expressions fortes se font entendre sous la forme d’impératifs destinés à relever l’Arlequin défaillant : Trompe la mort ! et Debout les morts !

Fort bien, dit Lucien l’âne, mais que veulent-elles exprimer de si fort ces fortes expressions ? Je te le demande.

D’abord, mon ami Lucien l’âne, honneur aux trompe-la-mort, qui idéalement, sont des gens comme nous qui jouent à cache-cache avec la camarde, qui se refusent à l’épouser et n’ont pas l’air de vouloir se décider à en finir . Ce sont des casse-cous, parfois.

Et puis, dit Lucien l’âne, c’était aussi l’idée de Tonton Georges qui disait, si je me souviens bien, sous ce titre de « Georges Brassens: Trompe la Mort», sa petite résurrection :

« Et puis, coup de théâtre, quand
Le temps aura levé le camp,
Estimant que la farce est jouée,
Moi tout heureux, tout enjoué,
Je n’exhumerai du caveau
Pour saluer sous les bravos »

Quant à Debout les morts !, Lucien l’âne mon ami, l’imagination s’en va directement à la grande guerre où le cri fusa dans une tranchée et comme le racontait ma grand-mère, qui vivait là-bas dans un hôpital à soldats, on cria

« Debout les morts ! Et les morts se levèrent et nous eûmes la victoire »

De l’autre côté, Bertolt Brecht raconte, dans sa Legende vom toten Soldaten – La Légende du Soldat Mort, le mort ressuscité de force par l’état-major et Georges Brassens encore chantait dans Le Bulletin de Santé:

« Et si vous entendez crier comme en quatorze:
« Debout ! Debout les morts ! », ne bombez pas le torse »

Évidemment, dit Lucien l’âne, on ne pouvait passer à côté de ça. Donc, avant que tu ne te relances, je résume ton résumé : Acte I : la mort ; Acte II : le refus de la mort. Et quid de l’Acte III ?

Dans l’Acte III, dit Marco Valdo M.I., on assiste à la résurrection d’Arlequin, réanimé par le souffle et puis, il est triste de l’avouer, abandonné par ses souffleurs, le pantin remeurt. Cette fois, définitivement.

C’est triste comme Venise, dit Lucien l’âne. Alors, restons-en là et concluons à notre ordinaire, plus encore de circonstance. Tissons le linceul de ce vieux monde submergé, calamiteux, morticole, mortifère, thanatophile, nécrophile, nécropole et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

Eine ganz neue Pantomime mit Harlekin.
Assis sur le gazon, Arlequin le bouffon
Masse ses joues, passe ses lèvres au vermillon,
Scrute ses mains, décharnées, vieilles, ses mains

Pierrot plâtré de blanc et Pantalon
Ânonnent l’épilogue de la Résurrection.
Arlequin bat des mains et s’écroule.
Πάντα ῥεῖ / Pánta rheî : tout s’écoule.

Oui, Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.

Pantalon veut creuser la tombe. Pas encore,
Pierrot veut garder le corps .
Le Docteur Faust surgit du décor :
Harlekin, Arlequin, Arlecchino : Trompe la mort !

Les morts peuvent-ils ressusciter ?
Natürlich, naturellement et pourquoi pas ?
Ô Pantalon ! Comment faire ça ?
« Debout les morts ! », il faut crier.

Oui, Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.

Pour ranimer la dépouille, vie lui redonner,
Inutile de crier, un souffle divin, il faut souffler.
Ils soufflent sur les jambes, ils soufflent sur les bras
Abracadabra, une fois et le pantin ressuscite déjà.

Pierrot, Pantalon retournent à leurs affaires.
Abandonné, désespéré, Arlequin retombe à terre ;
Arlequin n’est plus qu’un remort solitaire ;
Arlequin n’est plus qu’un mort sous la terre.

Oui, Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.

envoyé par Marco Valdo M.I. - 8/3/2020 - 17:28




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