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Toutes voiles dehors (Chant de l’équipage)

Marco Valdo M.I.
Langue: français



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Toutes voiles dehors (Chant de l’équipage)

Chanson française – Toutes voiles dehors – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 111
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, XIV)

Dialogue Maïeutique

Toutes voiles dehors


Voici, Lucien l’âne mon ami, une chanson hautement démocratique, tout à fait dans le prolongement de celle du « Le Maître de Cuisine », où le plébiscite des matelots avait porté Lamme au rang de Grand Chef-Coq et d’Illustrissime Maître-Queux de la Brielle, vaisseau amiral, avec l’assentiment de Trèslong, capitaine de son état. Dans la foulée, les marins avaient accordé pour le dimanche à Lamme (et à lui seul) une double portion.

Évidemment à Lamme la bedaine, dit Lucien l’âne en riant, et c’est un minimum. Ainsi, cette mesure se justifie d’elle-même, car Lamme n’est pas une demi-portion.

Justement, Lucien l’âne mon ami, l’affaire ne s’arrête pas là et l’équipage, de plus en plus enthousiaste, va dans son élan, tiré par la reconnaissance du ventre, attribuer à Lamme-la-panse une triple portion, mais dans la limite du dimanche.

Oui, dit Lucien l’âne, c’est une limitation sage qui s’inscrit dans les usages. D’autre part, c’est nécessaire pour le bien de Lamme, qui, sans elle, aurait fini par peser trop lourd. Note aussi que le dimanche – et peu importe où on le situe dans la semaine – est un jour de repos et de loisir, une petite fête hebdomadaire. C’est d’ailleurs une pratique qui – comme j’ai pu personnellement le constater – remonte à la plus haute antiquité ; ce fut une des premières grandes conquêtes sociales que les petites gens ont réussi à imposer aux riches et aux puissants. Par la suite, elle fut récupérée par les religieux qui en ont odieusement profité pour imposer leurs cérémonies. En tout cas, les petites gens y tiennent et chaque fois qu’un pouvoir ou un patron essaye d’y contrevenir, la résistance s’installe farouche. Et c’est vrai partout dans ce monde où règne La Guerre de Cent mille ans. À propos de ce monde, je doute fort qu’il en existe d’autres, ce qui explique mon obstination à dénoncer les travers de ce vieux monde et à en tisser quotidiennement le linceul, comme si je poussais aveuglé une meule.

Et, reprend Marco Valdo M.I., du fait que tout fait farine au moulin, il se pourrait bien que ta dénonciation finalement soit elle aussi profitable à ce vieux monde qui te débecte tant. Ce sont les paradoxes de nos temps incohérents. Cependant, Lucien l’âne mon ami, je te rappelle que ce n’est pas ici le lieu de se lancer dans des conférences à caractère historico-critique et qu’il s’agit seulement de quelques mots d’introduction à une chanson. Lors donc, je termine en te précisant en évitant toute considération oiseuse que principalement, cette chanson exalte la vie des Gueux de mer sur la mer et leur amoureux attachement à la liberté, raison pour laquelle leur dieu de référence, leur grande icône est Éros, le dieu de l’amour libre et c’est là toute leur religion.

Pour moi aussi, conclut Lucien l’âne, la seule religion tolérable est celle de la liberté et s’il me fallait saluer un dieu, ce serait Éros, à qui, chaque matin, nous les ânes, on érige un fraternel salut. Comme tu le devines, cette coutume matutinale est à l’origine de notre réputation, laquelle, soit dit en passant, n’est pas usurpée. Maintenant, tissons avec vigueur le linceul de ce vieux monde décrépit, mollasson, pernicieux, pervers et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Vive le maître-queux, le roi de cuisine
Grâce à lui, chaque jour, on dîne
Vive l’empereur des fricassées et du bouillon
Pour lui, le dimanche, triple portion !

Toutes voiles dehors comme des ailes,
Sur l’Océan, sur la mer, sur les fleuves, sur les canaux
Sous la pluie, sous la neige, sous le grésil, sous la grêle,
De l’hiver à l’hiver voguent les vaisseaux.

Toutes voiles dehors, toutes voiles dehors,
Ils passent, ils courent, ils volent
Comme font les nues au vent du nord,
Comme en ville volent les paroles.

Ils enlacent les vagues en amoureux.
Toutes voiles dehors comme des ailes,
Dans la brume, dans le soleil, sous la grêle.
Éros est libre, nom de Dieu !

Comme le vent porte la tempête,
Comme le nuage porte la foudre,
Les Gueux de mer lèvent haut la tête,
Les Gueux font parler la poudre.

Toutes voiles dehors, toutes voiles dehors,
Comme fait l’écume au vent du nord,
Les Gueux déferlent de plus en plus fort,
Les eaux s’en souviennent encore.

Comme les cygnes en liberté,
Ils font face au vent mauvais
Qui emporte les feuilles de l’été
Et sur l’eau signent un trait parfait.

Ils enlacent les vagues en amoureux.
Toutes voiles dehors comme des ailes,
Dans la brume, dans le soleil, sous la grêle.
Éros est libre, nom de Dieu !

De nuit, de jour, ils rêvent toujours
D’amour, de liberté, des Pays.
Le soleil les guide le jour,
L’étoile les mène de nuit.

Vive le maître-queux, le roi de cuisine
Grâce à lui, chaque jour, on dîne
Vive l’empereur des fricassées et du bouillon
Pour lui, le dimanche, triple portion !

envoyé par Marco Valdo M.I. - 23/11/2018 - 19:45




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