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À cause de la guerre

Bernard Dimey
Langue: français


Bernard Dimey

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Versi di Bernard Dimey (1931-1981), importante poeta e compositore di canzoni francese
Musica del compositore ed arrangiatore Jean Musy
Testo trovato qui
Nel volume “Les Huit péchés capitaux”, otto poesie illustrate dalle litografie originali di Jordi Bonàs (pittore catalano), 1973
Nell'album “La mer à boire”(LP del 1976 poi riedito i CD nel 1991?) e in raccolte come “Bernard Dimey - Testament (Intégrale)”.

La mer à boire
À cause de la guerre
les hommes de vingt ans n'aiment plus les bateaux
ni les horizons ni la mer ni les mots étonnants qui fleurissaient en rêves de voyage
autrefois
à cette époque où l'océan, quelle que soit l'heure, était bleu
sillonné de corvettes et de galères
Océan terrible et doux, ouvert aux aventures des hommes
Adolescence cristallisée, jeunesse impérissable
tout cela s'effrite
Les mots eux-mêmes qui savaient dessiner sur la nuit
des paysages incomparables
Les mots, peu à peu, se sont laissés défigurer
À cause de la guerre

À cause de la guerre
Les bateaux sont devenus l'un après l'autre des naufrages
Cependant, ils sont demeurés la quille droite,
éventrant les eaux sans un instant faillir
et la pipe est restée fichée droite
dans la gueule de l'homme de barre
et tous les passagers, forts de leur vingt ans
de leur arrogance et de leur candeur
Ignorant la route, résignés et joyeux
Morts d'avance
À cause de la guerre

À cause de la guerre
qui souffle les murailles
et qui, la nuit, arrache aux pierres elles-mêmes
des hurlements préhistoriques
les hommes de vingt ans, chimpanzés terrifiés
maladroits sous l'uniforme
ont brusquement deux mille ans de trop
À cause de la guerre


À cause de la guerre
Le pétrole s'apprête à remplacer le sang
et le scorpion se met à courir droit devant lui
affolé
infatigable
dérouté par cette vibration du sable à laquelle on ne résiste pas
devant laquelle il n'existe nul autre recours que la fuite éperdue
Le scorpion noir, aveuglé
terrifié par le grondement souverain des robots
qui se dressent à présent dans le ciel
Insectes démesurés, inassouvis
infatigablement féroces
implacables bourreaux de tous les paysages possibles
Le scorpion s'arrête, hésite un instant
puis sa queue lentement se redresse
et l'aiguillon perce le thorax
tandis qu'à l'horizon, de tous côtés
le pétrole jaillit, fleurit, s'épanouit en torches gigantesques
droites
d'une beauté foudroyante
et le dromadaire blanc lui aussi s'arrête et tremble
et soudain s'agenouille, paisiblement
sans hâte, non plus cette fois pour le repos mais pour la mort
À cause de la guerre

À cause de la guerre
Le cœur des femmes se laisse éteindre par le lierre
et leurs gestes se désaccordent
Il faut à nouveau déchiffrer le vieux grimoire de la patience
et l'apprendre par cœur
Afin d'en nourrir ses nuits et ses journées
Le vent tournera
les pluies et la grêle et la neige
tout cela viendra
fera son œuvre
et les femmes se dévisageront l'une l'autre
sans parler
se dévisageront
afin que le temps soit mesuré, et l'attente
et ce passé qui a pris, jour après jour, cruellement
toute la place
Le désespoir, dans le silence de la nuit
plaque une toile d'araignée sur le visage des femmes
À cause de la guerre

envoyé par Bernart Bartleby - 20/6/2017 - 22:10




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