So sterben wir, so sterben wir.
Wir sterben alle Tage,
Weil es so gemütlich sich sterben läßt.
Morgens noch in Schlaf und Traum
Mittags schon dahin.
Abends schon zu unterst im Grabe drin.
Die Schlacht ist unser Freudenhaus.
Von Blut ist unsre Sonne.
Tod ist unser Zeichen und Losungswort.
Kind und Weib verlassen wir :
Was gehen sie uns an ?
Wenn man sich auf uns nur verlassen kann !
So morden wir, so morden wir.
Wir morden alle Tage
Unsere Kameraden im Totentanz.
Bruder, reck Dich auf vor mir !
Bruder, deine Brust !
Bruder, der Du fallen und sterben mußt.
Wir murren nicht, wir knurren nicht,
Wir schweigen alle Tage,
Bis sich vom Gelenke das Hüftbein dreht.
Hart ist unsre Lagerstatt
Trocken unser Brot.
Blutig und besudelt der liebe Gott.
Wir danken Dir, wir danken Dir,
Herr Kaiser, für die Gnade,
Daß Du uns zum Sterben erkoren hast.
Schlafe Du, schlaf sanft und still,
Bis Dich auferweckt
Unser armer Leib, den der Rasen deckt.
Wir sterben alle Tage,
Weil es so gemütlich sich sterben läßt.
Morgens noch in Schlaf und Traum
Mittags schon dahin.
Abends schon zu unterst im Grabe drin.
Die Schlacht ist unser Freudenhaus.
Von Blut ist unsre Sonne.
Tod ist unser Zeichen und Losungswort.
Kind und Weib verlassen wir :
Was gehen sie uns an ?
Wenn man sich auf uns nur verlassen kann !
So morden wir, so morden wir.
Wir morden alle Tage
Unsere Kameraden im Totentanz.
Bruder, reck Dich auf vor mir !
Bruder, deine Brust !
Bruder, der Du fallen und sterben mußt.
Wir murren nicht, wir knurren nicht,
Wir schweigen alle Tage,
Bis sich vom Gelenke das Hüftbein dreht.
Hart ist unsre Lagerstatt
Trocken unser Brot.
Blutig und besudelt der liebe Gott.
Wir danken Dir, wir danken Dir,
Herr Kaiser, für die Gnade,
Daß Du uns zum Sterben erkoren hast.
Schlafe Du, schlaf sanft und still,
Bis Dich auferweckt
Unser armer Leib, den der Rasen deckt.
envoyé par Marco Valdo M.I. - 13/4/2016 - 23:12
Langue: français
Version française – DANSE MACABRE 1916 – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemande – Totentanz 1916 – Hugo Ball
Comme certainement tu le sais, Lucien l’âne mon ami, les danses macabres, qui sont les danses des morts, traversent l’histoire d’aussi longtemps qu’on s’en souvienne. Et peut-être même en as-tu déjà vues ?
J’en ai vu énormément en peinture et en gravure ; il y a même peut-être des sculptures, mais je n’en ai pas rencontrées. Si j’ai bien compris leur usage, elles servaient souvent à conjurer les destins effroyables et infernaux ou à les représenter pour impressionner les vivants.Mais n'avais-tu pas déjà établi une version française d'une Totentanz ?
C’est bien cela. Il s'agissait de la Danse Macabre en Flandre Flandrischer Totentanz, postérieure d'un an à celle-ci. J’ajouterais cependant que les danses macabres ont quelquefois pris la forme de chanson. Et c’est le cas de celle qui nous échoit d’aujourd’hui. La particularité, c’est qu’il s’agit d’une danse macabre, d’une danse de morts, d’une danse des morts contemporaine de l’auteur ; elle est datée de 1916 , il y a tout juste une centaine d’années. 1916, note bien l’année ; on se massacrait à qui mieux mieux dans la Marne, la Somme, l’Aisne, sur l’Yser et dans plein d’autres endroits d’Europe.
Je vois. Mais au fait, Marco Valdo M.I. mon ami, qui est cet auteur contemporain de sa chanson ?
Elle est l’œuvre, cette danse macabre moderne, d’un poète dadaïste, un des fondateurs du mouvement Dada. Il s’agit d’Hugo Ball, poète, romancier de langue allemande, né en 1886 dans la Rhénanie-Palatinat pas loin des frontières suisse et française. En 1915, il s’exile clandestinement en Suisse pour éviter son incorporation. En février 1916, il fonde à Zurich avec Huelsenbeck, Tzara, Arp et d’autres un mouvement artistique antinationaliste, antimilitariste et révolutionnaire : le mouvement Dada.
Et que raconte cette canzone, car de cela, tu ne m’as encore rien dit ?
Eh bien, Lucien l’âne mon ami, cette Totentanz 1916 est une chanson assez ironique, assez persifleuse que j’intitulerais plus volontiers : « Chanson macabre », « Chanson des morts », car ce sont eux qui, en quelque sorte, chantent leurs louanges à la mort et à l’Empereur (d’Allemagne) qui la leur a si généreusement offerte. Ils chantent ces morts du fond de leur tombe où ils attendent confortablement installés et tranquilles que l’Empereur vienne ressusciter leurs corps. Dès lors, tu imagines bien que ces morts ne sont ces quelques danseurs maigrichons que l’on voit sur les gravures ou les tableaux plus anciens, mais ces millions de cadavres qui parsèment les champs, les bois et les vallées d’Europe.
Découvrons cette étrange mélopée macabre et reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde toujours parsemé de cadavres et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Chanson allemande – Totentanz 1916 – Hugo Ball
Comme certainement tu le sais, Lucien l’âne mon ami, les danses macabres, qui sont les danses des morts, traversent l’histoire d’aussi longtemps qu’on s’en souvienne. Et peut-être même en as-tu déjà vues ?
J’en ai vu énormément en peinture et en gravure ; il y a même peut-être des sculptures, mais je n’en ai pas rencontrées. Si j’ai bien compris leur usage, elles servaient souvent à conjurer les destins effroyables et infernaux ou à les représenter pour impressionner les vivants.Mais n'avais-tu pas déjà établi une version française d'une Totentanz ?
C’est bien cela. Il s'agissait de la Danse Macabre en Flandre Flandrischer Totentanz, postérieure d'un an à celle-ci. J’ajouterais cependant que les danses macabres ont quelquefois pris la forme de chanson. Et c’est le cas de celle qui nous échoit d’aujourd’hui. La particularité, c’est qu’il s’agit d’une danse macabre, d’une danse de morts, d’une danse des morts contemporaine de l’auteur ; elle est datée de 1916 , il y a tout juste une centaine d’années. 1916, note bien l’année ; on se massacrait à qui mieux mieux dans la Marne, la Somme, l’Aisne, sur l’Yser et dans plein d’autres endroits d’Europe.
Je vois. Mais au fait, Marco Valdo M.I. mon ami, qui est cet auteur contemporain de sa chanson ?
Elle est l’œuvre, cette danse macabre moderne, d’un poète dadaïste, un des fondateurs du mouvement Dada. Il s’agit d’Hugo Ball, poète, romancier de langue allemande, né en 1886 dans la Rhénanie-Palatinat pas loin des frontières suisse et française. En 1915, il s’exile clandestinement en Suisse pour éviter son incorporation. En février 1916, il fonde à Zurich avec Huelsenbeck, Tzara, Arp et d’autres un mouvement artistique antinationaliste, antimilitariste et révolutionnaire : le mouvement Dada.
Et que raconte cette canzone, car de cela, tu ne m’as encore rien dit ?
Eh bien, Lucien l’âne mon ami, cette Totentanz 1916 est une chanson assez ironique, assez persifleuse que j’intitulerais plus volontiers : « Chanson macabre », « Chanson des morts », car ce sont eux qui, en quelque sorte, chantent leurs louanges à la mort et à l’Empereur (d’Allemagne) qui la leur a si généreusement offerte. Ils chantent ces morts du fond de leur tombe où ils attendent confortablement installés et tranquilles que l’Empereur vienne ressusciter leurs corps. Dès lors, tu imagines bien que ces morts ne sont ces quelques danseurs maigrichons que l’on voit sur les gravures ou les tableaux plus anciens, mais ces millions de cadavres qui parsèment les champs, les bois et les vallées d’Europe.
Découvrons cette étrange mélopée macabre et reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde toujours parsemé de cadavres et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
DANSE MACABRE 1916
Ainsi nous mourons, ainsi nous mourons.
Et tous les jours, nous mourons,
Car se laisser mourir est si confortable.
Le matin encore dans le sommeil et le rêve
À midi là-bas.
Le soir au fond de la tombe déjà.
La bataille est notre maison close.
Notre soleil est de sang.
La mort est notre voie et notre mot d’ordre.
Nous quittons femme et enfant –
Que peut nous importer ?
Quand on vient justement de se quitter.
Ainsi nous assassinons, ainsi nous assassinons.
Tous les jours, nous assassinons
Nos camarades de danse macabre.
Mets-toi devant moi, mon frère,
Avance ta poitrine, mon frère
C’est toi qui dois tomber et mourir, mon frère.
Nous ronchonnons peu, nous grognons moins,
Nous nous taisons tout le jour,
Jusqu’à ce que l’iliaque fasse demi-tour.
Dur, notre lit de camp
Sec, notre pain.
Le cher Dieu, sanglant et salissant.
Nous te remercions, nous te remercions,
Empereur, de ta faveur pleine d’affection,
De nous désigner pour la mort .
Dors seulement, dors doux et calme,
Jusqu’à ce que tu ressuscites encore,
Notre pauvre corps que l’herbe recouvre.
Ainsi nous mourons, ainsi nous mourons.
Et tous les jours, nous mourons,
Car se laisser mourir est si confortable.
Le matin encore dans le sommeil et le rêve
À midi là-bas.
Le soir au fond de la tombe déjà.
La bataille est notre maison close.
Notre soleil est de sang.
La mort est notre voie et notre mot d’ordre.
Nous quittons femme et enfant –
Que peut nous importer ?
Quand on vient justement de se quitter.
Ainsi nous assassinons, ainsi nous assassinons.
Tous les jours, nous assassinons
Nos camarades de danse macabre.
Mets-toi devant moi, mon frère,
Avance ta poitrine, mon frère
C’est toi qui dois tomber et mourir, mon frère.
Nous ronchonnons peu, nous grognons moins,
Nous nous taisons tout le jour,
Jusqu’à ce que l’iliaque fasse demi-tour.
Dur, notre lit de camp
Sec, notre pain.
Le cher Dieu, sanglant et salissant.
Nous te remercions, nous te remercions,
Empereur, de ta faveur pleine d’affection,
De nous désigner pour la mort .
Dors seulement, dors doux et calme,
Jusqu’à ce que tu ressuscites encore,
Notre pauvre corps que l’herbe recouvre.
envoyé par Marco Valdo M.I. - 13/4/2016 - 23:13
Langue: finnois
Suomennos Seppo Ilmarinen
KUOLEMANTANSSI 1916
Niin me kuolemme, niin kuolemme.
Kuolemme päivästä toiseen,
koska kuoleminen on niin mukavaa.
Aamulla vielä unten mailla,
päivällä tuonen porteilla.
Illalla jo alimpana haudan pohjalla.
Taistelu on ilotalomme.
Verta on aurinkomme.
Kuolema on merkkimme ja tunnussanamme.
Lapset ja vaimon jätämme:
Mitäpä me heistä,
kunhan meihin vain luotetaan!
Niin me murhaamme, niin murhaamme.
Murhaamme päivästä toiseen.
Tovereitamme kuolemantanssissa.
Veli, tulta päin!
Veli, sinun rintasi!
Veli, sinä, jonka osana on kaatua ja kuolla.
Me emme valita emmekä purnaa,
me vaikenemme päivästä toiseen,
kunnes lonkkaluumme vääntyy paikaltaan.
Kova on makuusijamme
ja kuivaa leipämme.
Veren tahraama rakas jumalamme.
Me kiitämme Sinua, kiitämme Sinua
keisarimme siitä armosta,
että olet valinnut meidät kuolemaan.
Nuku unta syvää ja rauhaisaa,
kunnes sinut herättää
kurja ruumiimme, joka nurmen alla lepää.
Niin me kuolemme, niin kuolemme.
Kuolemme päivästä toiseen,
koska kuoleminen on niin mukavaa.
Aamulla vielä unten mailla,
päivällä tuonen porteilla.
Illalla jo alimpana haudan pohjalla.
Taistelu on ilotalomme.
Verta on aurinkomme.
Kuolema on merkkimme ja tunnussanamme.
Lapset ja vaimon jätämme:
Mitäpä me heistä,
kunhan meihin vain luotetaan!
Niin me murhaamme, niin murhaamme.
Murhaamme päivästä toiseen.
Tovereitamme kuolemantanssissa.
Veli, tulta päin!
Veli, sinun rintasi!
Veli, sinä, jonka osana on kaatua ja kuolla.
Me emme valita emmekä purnaa,
me vaikenemme päivästä toiseen,
kunnes lonkkaluumme vääntyy paikaltaan.
Kova on makuusijamme
ja kuivaa leipämme.
Veren tahraama rakas jumalamme.
Me kiitämme Sinua, kiitämme Sinua
keisarimme siitä armosta,
että olet valinnut meidät kuolemaan.
Nuku unta syvää ja rauhaisaa,
kunnes sinut herättää
kurja ruumiimme, joka nurmen alla lepää.
envoyé par Seppo Ilmarinen - 1/5/2016 - 23:51
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Lied – Hugo Ball – 1916
Nach der Melodie "So leben wir"
Interpretata da Emmy Hennings (nata Emma Maria Cordsen, 1885-1948), moglie di Hugo Ball, nel 1917 a Zurigo al Cabaret Voltaire, il locale notturno che la coppia aveva fondato l'anno precedente insieme ad un manipolo di anarchici e dadaisti.