Au souffle tiède du roi Printemps
Hiver perd toute sa force.
Lucifer avec des chaînes de diamants
Lie le géant au pôle.
En un cri amoureux, il appelle
Et du ciel, une femme blonde, nue et belle
Tombe doucement. Je suis là, mon roi.
Je n’ai d’autre faim, d’autre soif que toi.
Ils gagnent alors leurs trônes
De roi et de reine ;
De leurs voix mêlées, ils réveillent
La nature et la terre s’émerveille.
Pareil aux vagues de la mer
Le sol se tord ; monte et descend la terre.
Des génies, des elfes, des trolls se pressent,
Entre les arbres, ils vacillent d’ivresse.
Nains, gardiens de trésor, pattus, bossus, velus ;
Hommes des bois aux corps de racines tordus ;
Empereurs des mines, automates brillants,
Trolls à queue de lézard, têtes de crapauds luisants.
Les filles-fleurs, Vénus venues d’ailleurs,
Une douce chanson murmurent.
Elles n’ont pour manteau que leur chevelure
Et de leur bouche rouge font un cœur.
On les voit parfois par les parcs et les jardins,
Au fond des bois, par les sentiers ombreux,
Insuffler aux mignonnes le goût des amoureux,
Car la moitié des baisers leur revient en butin.
Les esprits protecteurs des étoiles
Les génies de la pluie, des vents, et de la brise,
Jeunes gens ailés arrivent droit du ciel
Escortés par les mignonnes hirondelles.
La lumière éclate et on entend :
« Gloire au Roi Printemps ! Lumière ! Sève ! »
Nelle et Till, cachés par un chêne,
Écoutent muets ce vacarme angoissant.
Chez les esprits, c’est la guerre !
Sur des araignées, des tortues, des serpents,
Des crocodiles et cent mille insectes répugnants,
Tous s’entrebattent et le fort mange le faible.
Hiver perd toute sa force.
Lucifer avec des chaînes de diamants
Lie le géant au pôle.
En un cri amoureux, il appelle
Et du ciel, une femme blonde, nue et belle
Tombe doucement. Je suis là, mon roi.
Je n’ai d’autre faim, d’autre soif que toi.
Ils gagnent alors leurs trônes
De roi et de reine ;
De leurs voix mêlées, ils réveillent
La nature et la terre s’émerveille.
Pareil aux vagues de la mer
Le sol se tord ; monte et descend la terre.
Des génies, des elfes, des trolls se pressent,
Entre les arbres, ils vacillent d’ivresse.
Nains, gardiens de trésor, pattus, bossus, velus ;
Hommes des bois aux corps de racines tordus ;
Empereurs des mines, automates brillants,
Trolls à queue de lézard, têtes de crapauds luisants.
Les filles-fleurs, Vénus venues d’ailleurs,
Une douce chanson murmurent.
Elles n’ont pour manteau que leur chevelure
Et de leur bouche rouge font un cœur.
On les voit parfois par les parcs et les jardins,
Au fond des bois, par les sentiers ombreux,
Insuffler aux mignonnes le goût des amoureux,
Car la moitié des baisers leur revient en butin.
Les esprits protecteurs des étoiles
Les génies de la pluie, des vents, et de la brise,
Jeunes gens ailés arrivent droit du ciel
Escortés par les mignonnes hirondelles.
La lumière éclate et on entend :
« Gloire au Roi Printemps ! Lumière ! Sève ! »
Nelle et Till, cachés par un chêne,
Écoutent muets ce vacarme angoissant.
Chez les esprits, c’est la guerre !
Sur des araignées, des tortues, des serpents,
Des crocodiles et cent mille insectes répugnants,
Tous s’entrebattent et le fort mange le faible.
inviata da Marco Valdo M.I. - 11/2/2016 - 21:03
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Chanson française – Le Roi Printemps – Till et Nelle (2) – Marco Valdo M.I. – 2016
Ulenspiegel le Gueux – 27
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – I, LXXXV)
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l’édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d’où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.
Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la vingt et septième canzone de l’histoire de Till le Gueux. Les vingt-six premières étaient, je te le rappelle :
01 Katheline la bonne sorcière Katheline, la bonne sorcière (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe Till et Philippe(Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique La Guenon Hérétique(Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame Gand, La Dame(Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! Coupez les pieds !(Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till Exil de Till(Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till En ce temps-là, Till(Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée Katheline suppliciée(Ulenspiegel – I, XXXVIII)
09. Till, le roi Philippe et l’âne Till, le roi Philippe et l'âne(Ulenspiegel – I, XXXIX)
10. La Cigogne et la Prostituée La Cigogne et la Prostituée(Ulenspiegel – I, LI)
11. Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants ! Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants !(Ulenspiegel – I, LII)
12. La messe du Pape, le pardon de Till et les florins de l’Hôtesse La messe du Pape, le pardon de Till et les florins de l’Hôtesse(Ulenspiegel – I, LIII)
13. Indulgence Indulgence (Ulenspiegel – I, LIV)
14. Jef, l’âne du diable Jef, l’âne du diable (Ulenspiegel – I, LVII)
15. Vois-tu jusque Bruxelles ? Vois-tu jusque Bruxelles ? (Ulenspiegel – I, LVIII)
16. Lamentation de Nelle, la mule et la résurrection Lamentation de Nelle, la mule et la résurrection (Ulenspiegel – I, LXVIII)
17. Hérétique le Bonhomme Hérétique le Bonhomme (Ulenspiegel – I, LXIX)
18. Procès et condamnation Procès et condamnation (Ulenspiegel – I, LXIX)
19. La Mort de Claes, le charbonnier La Mort de Claes, le charbonnier (Ulenspiegel – I, LXXIV)
20. Le Talisman rouge et noir Le Talisman rouge et noir (Ulenspiegel – I, LXXV)
21. La Vente à l’encan La Vente à l'encan (Ulenspiegel – I, LXXVI)
22. Telle est la Question Telle est la Question (Ulenspiegel – I, LXXVIII)
23. Charles et Claes Charles et Claes (Ulenspiegel – I, LXXIX)
24. Trois cents ans de torture Trois cents ans de torture (Ulenspiegel – I, LXXIX)
25. Au bord du canal Au bord du canal (Ulenspiegel – I, LXXXIV)
26. Le Géant Hiver Le Géant Hiver – Till et Nelle (1) (Ulenspiegel – I, LXXXV)
Et donc, dans le rêve fantastique où sont plongés Nelle et Till, Lucifer, littéralement « le porteur de lumière », vient d’apparaître. C’est le Roi Printemps qui vient ainsi chasser le Géant Hiver.
Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, cette histoire-là, je la connais. Pour moi, elle est vieille comme le monde. Il s’agit d’une de ces péripéties de la grande saga de la nature, une manière totalement païenne d’immortaliser le monde, de scander la vie, de saluer l’infinitude du cycle de la vie.
Cette infinitude à l’échelle de la vie humaine sempiternellement répétée. C’est le sacre du Printemps que chantera et fera danser plus tard le musicien Strawinsky ; mais je te rassure tout de suite : en beaucoup moins barbare. On ne sacrifiera pas Nelle à un Iarilo, dieu sanguinaire dans la plus pure tradition. Ici, comme on le verra, le Roi Printemps sera finalement bienveillant avec ces humains venus clandestinement dans son royaume.
Au passage, dit Lucien l’âne, je constate que ni Hiver, ni Printemps ne sont des divinités. C’est une rupture par rapport aux religions, même paganistes. Cela me réjouit, car chez nous les ânes, un Dieu ou des Dieux, cela n’existe pas.
Puis, le Roi est rejoint par sa blonde Reine et commence alors une sarabande d’êtres divers : elfes, huldres, goublins, nains, filles-fleurs, esprits et monstres en tous genres. Ainsi, Till et Nelle assistent de leur cachette au sacre du Printemps.
Mais, dit Lucien l’âne, ils devraient quand même se méfier car « Méfious des goublins, méfious des goublins qui rôdent l’soi dans les qu’mins » (Méfiez-vous des gobelins, méfiez-vous des gobelins qui rôdent le soir par les chemins), disait le poète Rossel.
Revenons maintenant, si tu le veux bien, un instant au personnage de Lucifer, Roi Printemps. Son nom le désigne comme le « Porteur de Lumière »…
De fait, le printemps est le moment où la lumière reconquiert le monde et la nature et où la vie reprend ses droits. Mais, vois-tu Lucien l’âne mon ami, il faut aussi prendre en compte le sens symbolique de ce conte fantastique et voir que la Lumière, c’est la science qui vainc les ténèbres (« Scientia vincere tenebras » est la devise de l’université que fréquenta Charles de Coster) ; les ténèbres que répandent les religions – peu importe ici qu’elles soient païennes, juives, chrétiennes, musulmanes ou n’importe lesquelles. Il y en a tellement et de ce point de vue, elles sont toutes pareilles.
Voyons la chanson et reprenons notre tâche. Tissons le linceul de ce vieux monde enténébré par les croyances, rongé par les mythes, manipulé par les religions et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane