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Chanson des Exilés

Marco Valdo M.I.
Lingua: Francese


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Chanson des Exilés

Chanson française – Chanson des Exilés – Marco Valdo M.I. – 2015

Nul son, sinon nos pas sonores,  <br />
N'embellissait le décor.  <br />
Une voix nous disait : " Marche encore ! "
Nul son, sinon nos pas sonores,
N'embellissait le décor.
Une voix nous disait : " Marche encore ! "


Lucien l'âne mon ami, voici une chanson de l'exil : c'est la chanson des exilés. Pas d'un exil particulier, mais de tous les exils qui, dans le fond, se ressemblent. Simplement, il s'agit d'un exil à pied ; un exil qui se gagne à la plante du pied, car souvent même, c'est la dernière planche de salut.

Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, ce n'est pas à moi que tu dois exposer les bienfaits et les inconvénients de la marche… Ni les rigueurs de l'exil… Moi, qui, âne d'or pourtant, vit l'exil depuis tant de temps. Mais parle-moi de la chanson...

Elle est écrite aujourd'hui dans un moment où des cohortes d'exilés vont et viennent entre les pays, entre les continents. Il y a là une fuite éperdue qui rappelle les grandes migrations, dont nous sommes les descendants. Comme tu le sais, l'exil est une constante des grands groupes humains. Quant à la chanson, c'est toute une histoire. Elle m'est venue en tête en raison des événements qui bruissent dans le vent et il fallait donc une chanson de l'exil et qui chante un exil où l'on marche. Faut dire que cette idée m'est arrivée quand j'étais occupé à faire la version française de la dernière canzone de Riccardo Venturi - La crociata dei Siriani ; et, tout en traduisant cette épopée, j'avais la mémoire qui me démangeait et glissant entre les mots comme un goût de poésie, comme un souvenir de Verlaine. J'ai repris La Bonne Chanson et je suis arrivé à ces chemins perfides… Une chanson d'amour, dont je te livre le texte, si tu le désires…

Certes, certes, certainement que je veux t'entendre dire, chantonner du Verlaine. Ce sera la meilleure des introductions et la preuve aussi qu'en ton cœur la poésie chante aussi. Maintenant, va-s-y, je t'écoute...

Avant cela, juste deux mots pour faire ressortir le parallélisme entre les deux textes : celui de Verlaine et le mien… Comme tu pourras le constater, mon texte est véritablement une parodie – au sens poétique du terme. La chanson, l'ai-je dit déjà, s'intitule « J'allais par des chemins perfides », elle date de 1870. Maintenant, écoute la voix étrange et pénétrante de Paul Verlaine :

J'allais par des chemins perfides,
Douloureusement incertain.
Vos chères mains furent mes guides.

Si pâle à l'horizon lointain
Luisait un faible espoir d'aurore ;
Votre regard fut le matin.

Nul bruit, sinon son pas sonore,
N'encourageait le voyageur.
Votre voix me dit : " Marche encore ! "

Mon cœur craintif, mon sombre cœur
Pleurait, seul, sur la triste voie ;
L'amour, délicieux vainqueur,

Nous a réunis dans la joie.


Alors là, Marco Valdo M.I. mon ami, quelle musique… Les mots sont des notes, les vers sont des lignes de mélodie... Je suis maintenant encore plus impatient qu'à l'ordinaire de voir ce que tu en as fait… D'autant que tu n'hésites pas à faire connaître cette source miraculeuse…

Tu sais, Lucien l'âne mon ami, nous qui griffonnons nos chansons, on va par les chemins de l'écriture, un peu somnambules, un peu à l'aventure… En somme, on vit en exil dans ce monde trop agité par des envies triviales. Non, je ne serai pas gêné par la comparaison, me fût-elle imputée à honte. Mais tout compte fait, je préfère travailler sur une bonne planche. On est comme les arbres fruitiers, on mature des fruits, on les laisse à qui les veut… Parfois, ils sont rouges, parfois, ils sont bleus. Parfois, ils râpent la langue, parfois même, ils donnent la colique… Que sais-je ? Ce sont des fruits.

Passons à la chanson d'exil… et ensuite, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde violent, cataclysmique, tremblant sur ses bases (militaires) et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Nous avons fui par des chemins perfides.
Odieux et avides,
Les passeurs furent nos guides.

Si pâle, si vague, si incertain,
Le havre gîtait dans un lointain
Et nos regards ne portaient pas si loin.

Nul son, sinon nos pas sonores,
N'embellissait le décor.
Une voix nous disait : " Marche encore ! "

Nos corps craintifs, nos sombres cœurs
Rongeaient, seuls, notre longue peur ;
On ne venait pas du camp des vainqueurs,

Ah ! Demain ! Demain ! Il s'agit de survivre, pour l'heure.

inviata da Marco Valdo M.I. - 10/9/2015 - 22:33


Pour des raisons assez fondamentales, à mes yeux, j'ai l'habitude de ne pas indiquer l'origine, l'auteur, la provenance des illustrations des chansons, des canzones et plus généralement, des textes que je propose au vent des temps. En très bref, le principe en est que l'image est par essence une illustration, un commentaire, une sorte de matière incorporée en tant que telle (je veux dire en tant que matériau) au texte et elle ne peut être l'objet d'un droit de propriété à partir du moment qu'elle vogue dans l'éther. Elle est une chose évanescente, une sorte de paillon que parfois, je capte et j'apprivoise. Souvent, j'en change les couleurs, la taille, je la travaille un peu. Ce n'est plus la même image, elle n'est plus elle-même. Je dis tout cela en préambule à une démarche exceptionnelle et contraire concernant ces marcheurs de l'exil.

Je le dis abruptement ; qu'on ne s'y trompe pas, ils ne sont plus les mêmes ; ils ne sont plus eux-mêmes. Et en cela, pour cela, à cause de cela, il importe de les nommer dans leur pristin état. Car, à les voir, vraiment, on ne les reconnaît pas pour ce qu'ils étaient. Donc et c'est une belle et terrible histoire, qui me rappelle une de mes premières chansons pour les C.C.G. : Rainer sculpteur, qui relatait l'histoire d'un sculpteur allemand exilé en France, fuyant le nazisme qui rongeait son pays, et mis dans un camp. À l'époque déjà, on mettait dans les camps les réfugiés.

Donc, le tableau, la peinture ici présentée semble – à première vue, montrer des gens d'un monde ancien, qui marchent appuyés sur des bâtons, la tête prise dans ce qui ressemble à un bonnet ou un turban. On les dirait venant du Moyen-Orient, portraicturés dans un tableau ancien. En plus, le titre du tableau – je veux parler de son titre originel, est tout aussi amphibologique : La Marche de Saint Nicolas… On songe à l'évêque de Myre, vers 300, là-bas dans l'ancienne Lycie (pays des loups), partie de l'actuelle Anatolie. C'est d'ailleurs ainsi que je l'avais – dans un premier temps interprétée. Interprétation fausse, on le verra, mais qui sert bien la chanson des exilés.
Et maintenant, la véritable histoire de cette image. Elle est l’œuvre d'un des leurs, d'un de ceux qui figurent sur le tableau, qui fut aussi de nos contemporains – certains d'entre nous l'ont croisé : il s'agit d'Henry Gowa (Hambourg 1902 – Munich 1990), peintre allemand, exilé antinazi, réfugié en France dans les années 30. J'extrais quelques lignes de sa notice dans le wiki allemand et j'en donne une version française :

« Gowa est né Hermann Gowa à Hambourg. Après des études de décorateur à Munich. Il travailla à Munich, Leipzig et à partir de 1928 au théâtre d'artiste de Francfort. En 1931, le galeriste Ludwig Schames lui a consacré une exposition, où ses peintures et projets de scénographie ont été montrés pour la première fois dans une exposition particulière. Avec la prise de pouvoir des nazis, Gowa a émigré à Paris et a été interné. Du dégoût de son homonymie avec Hermann Göring, il a changé son prénom en Henry. Grâce à ses contacts dans la Résistance, Gowa put se cacher dans un village de montagne du sud de la France et a pu ainsi échapper à la Shoa. »

Revenons à ces marcheurs de Saint Nicolas, un tableau daté du 27 juin 1940, époque où la France est coupée en deux et où jusqu'en 1943, dans la zone sud se sont réfugiés tous ceux qui fuyaient le nazisme et où on les interne : « L'odyssée du Train des Milles s'achève quelques jours plus tard : le convoi rebrousse chemin, il est ensuite stoppé en rase campagne, dans la proximité de Nîmes. Les passagers du train effectuent une longue marche parmi les garrigues, vers un autre camp où l'on se hâte de décharger des bottes de paille et des tentes marabout. Cette longue marche jusque vers le château de Saint-Nicolas dans le Gard est magistralement transposée dans une toile peinte par Gowa le 27 juin 1940, sa reproduction figure au début de cet article. » (Avril-Juin 1940 : le peintre Henry Gowa à Lambesc et au camp de Saint-Nicolas).

Ainsi, on le voit, il y a là une image derrière l'image et les marcheurs allemands anti-nazis de 1940 peuvent à présent, grandioses figurants, interpréter, comédiens de l'histoire, tous les marcheurs exilés du monde, quelles que soient les raisons et les circonstances de l'exil.

Comme on le voit, resituer l'image dans le contexte de sa création et de son créateur répond, cette fois, à une nécessaire compréhension politique.


Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.

Marco Valdo M.I. - 11/9/2015 - 10:36




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