Die Straßen haben Einsamkeitsgefühle
Und fährt ein Auto, ist es sehr antik
Nur ab und zu mal klappert eine Mühle
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Aus Pappe und aus Holz sind die Gardinen
Den Zaun bedeckt ein Zettelmosaik
Wer rauchen will, der muss sich selbst bedienen
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Einst waren wir mal frei
Nun sind wir besetzt
Das Land ist entzwei
Was machen wir jetzt?
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt gibt's im Laden Karbonaden schon und Räucherflunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Der deutsche Bauch erholt sich auch und ist schon sehr viel runder
Jetzt schmeckt das Eisbein wieder in Aspik
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Man muss beim Autofahren nicht mehr mit Brennstoff sparen
Wer Sorgen hat, hat auch Likör und gleich in hellen Scharen
Die Läden offenbaren uns wieder Luxuswaren
Die ersten Nazis schreiben fleißig ihre Memoiren
Denn den Verlegern fehlt es an Kritik
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Wenn wir auch ein armes Land sind
Und so ziemlich abgebrannt sind
Zeigen wir, dass wir imposant sind
Weil wir etwas überspannt sind
Wieder haun' wir auf die Pauke
Wir leben hoch hoch hoch hoch hoch höher hoch
Das ist das Wirtschaftswunder
Das ist das Wirtschaftswunder
Zwar gibt es Leut, die leben heut noch zwischen Dreck und Plunder
Doch für die Naziknaben, die das verschuldet haben
Hat unser Staat viel Geld parat und spendet Monatsgaben
Wir sind ne ungelernte Republik
Ist ja kein Wunder ist ja kein Wunder
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Und fährt ein Auto, ist es sehr antik
Nur ab und zu mal klappert eine Mühle
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Aus Pappe und aus Holz sind die Gardinen
Den Zaun bedeckt ein Zettelmosaik
Wer rauchen will, der muss sich selbst bedienen
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Einst waren wir mal frei
Nun sind wir besetzt
Das Land ist entzwei
Was machen wir jetzt?
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt gibt's im Laden Karbonaden schon und Räucherflunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Jetzt kommt das Wirtschaftswunder
Der deutsche Bauch erholt sich auch und ist schon sehr viel runder
Jetzt schmeckt das Eisbein wieder in Aspik
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Man muss beim Autofahren nicht mehr mit Brennstoff sparen
Wer Sorgen hat, hat auch Likör und gleich in hellen Scharen
Die Läden offenbaren uns wieder Luxuswaren
Die ersten Nazis schreiben fleißig ihre Memoiren
Denn den Verlegern fehlt es an Kritik
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Wenn wir auch ein armes Land sind
Und so ziemlich abgebrannt sind
Zeigen wir, dass wir imposant sind
Weil wir etwas überspannt sind
Wieder haun' wir auf die Pauke
Wir leben hoch hoch hoch hoch hoch höher hoch
Das ist das Wirtschaftswunder
Das ist das Wirtschaftswunder
Zwar gibt es Leut, die leben heut noch zwischen Dreck und Plunder
Doch für die Naziknaben, die das verschuldet haben
Hat unser Staat viel Geld parat und spendet Monatsgaben
Wir sind ne ungelernte Republik
Ist ja kein Wunder ist ja kein Wunder
Ist ja kein Wunder nach dem verlorenen Krieg
Contributed by Bernart Bartleby - 2014/4/7 - 14:05
Language: French
Versione francese di Marco Valdo M.I.
Version française – CHANSON DU MIRACLE ÉCONOMIQUE – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemande – Lied vom Wirtschaftswunder – Wolfgang Neuss – 1958
Pseudonyme de Günter Neumann (1913-1972), d’artiste polyédrique, cabarettiste, auteur-compositeur et pianiste.
Musique de Günter Neumann et de Franz Grothe (1908-1982), compositeur.
Tirée du film : « Wir Wunderkinder » – 1958 (Nous les enfants prodiges).
Allemagne du premier au second après-guerre. Le réalisateur Kurt Hoffmann transpose au cinéma un récit « Wir Wunderkinder » – 1958 (Nous les enfants prodiges) de l’écrivain Hugo Hartung (1902-1972) et, sur un ton pétillant et de cabaret (les scènes sont reliées entre elles par des chansons, en style brechtien), il raconte la montée du nazisme et ensuite la reconstruction de l’Allemagne après la guerre à travers des tribulations de deux protagonistes, Hans Boeckel (interprété de Hansjörg Felmy) et Bruno Tiches (Robert Graf), deux camarades de classe. Le premier est un journaliste honnête rencontrant beaucoup de difficultés sous le régime nazi ; le second est par contre un opportuniste intrigant qui fait carrière durant le Reich et ensuite, se livre au marché noir avec les Alliés et devient un gros entrepreneur. Mais un jour arrive le moment où il faut rendre des comptes.
Comme le racontait Horst Lommer dans ses Nürnberger Betrachtungen, la prétendue « dénazification » de l’Allemagne fut beaucoup plus de la propagande qu’autre chose. Par ailleurs, nous ne « défascistifiâmes » rien ou presque, il est vrai que dans les deux les pays les démocrate-chrétiens revinrent au pouvoir etse recyclèrent dans leurs rangs nombre de gens qui avaient (bien) vécu à l’ombre des régimes. On avait sauvé le statu quo du « grand péril rouge », au prix de quelque compromission avec ceux qui avaient soutenu – ou au moins n’avaient pas dénoncé – le nazifascisme. La reconstruction de l’Europe Atlantique, soutenue par les généreuses subventions américaines, était une priorité qui ne pouvait pas se perdre dans des distinguos et des finesses : tout faisait farine. Ensuite le « miracle économique » des années 60 poussa les démocrate-chrétiens à coopter les sociaux-démocrates, pour se soutenir mutuellement et se partager l’appétissant gâteau ; en Allemagne, ce furent les « Große Koalition », inaugurées par un (ex-) nazi, le chancelier Kurt Georg Kiesinger ; en Italie, ce fut le « Centre-gauche » des divers gouvernements Fanfani (lequel avait beaucoup écrit sur la « Doctrine Fasciste » et avait été parmi les signataires du « Manifeste de la Race ») et Moro (qui pendant le fascisme avait été enseignant de « Politique coloniale » et avait activement participé aux « Littoriali » (Lictoriales), organisés par les Jeunesses Universitaires Fascistes).
Commentaire italien de Bernard Bartleby (Chansons contre la Guerre)
Dialogue maïeutique
Lucien l’âne mon ami, je pense que cette fois, tu ne me demanderas pas trop d’éclaircissements à propos du titre, ni de détails quant à la chanson et à l’histoire qu’elle raconte. Beaucoup a été dit par notre commentateur italien. Cela étant, il nous faut réfléchir au sens de cette histoire et à ce qu’elle peut signifier aujourd’hui. Et là, il y a des choses à dire.
Ho ho, dit Lucien l’âne en ouvrant des yeux comme des pupilles de chat à la tombée de la nuit. Je suis fort impatient de savoir de quelles choses il peut s’agir et aussi, de voir quels genres de commentaires cette chanson va t’inspirer. J’en ai bien une petite idée, mais tout en sachant que tu vas me bassiner de considérations à propos du miracle économique, je me dis que tu le feras d’une façon inhabituelle et c’est ce qui me turlupine – un peu. Ce sera sans doute – je le parie – dans le droit fil de ce qu’on peut deviner de l’ironie de la chanson, car il me paraît que cette chanson recadre les faits et situe – à sa manière – la résurrection économique de l’Allemagne dans un continuum, dans un flux issu des épisodes précédents de son histoire (et de la nôtre, conséquemment).
Tu as vu juste, Lucien l’âne mon ami, mais laisse-moi le temps de mettre mes lunettes. D’abord, car cette canzone est bien une parodie, elle est pleine d’ironie, amère sans soute, mais qui ne l’aurait pas été en voyant ce qui se passait alors en Allemagne. Par parenthèse, ce fut pareil dans tous les pays qui avaient fait partie de l’Axe (notamment, Japon, Italie) ou pour ceux qui dans les pays envahis s’étaient acoquinés avec l’occupant – marché noir, profits, fortunes, postes honorifiques, gratifications, sinécures, prébendes et bénéfices divers à des degrés divers. Bref, c’était « on prend les mêmes et on continue ». Ceci m’amène à une première réflexion concernant le titre du roman « Wir Wunderkinder » de Hugo Hartung et du film qui en est tiré par Kurt Hofmann. Cette réflexion porte sur la traduction du mot « Wunderkind », qui est généralement traduit par « enfant prodige ».
Voilà qui est intéressant, dit Lucien l’âne en approuvant solidement d’un mouvement vertical de la tête et de ses oreilles à contretemps. Mais encore ?
Mais encore ?, reprend Marco Valdo M.I. sans se soucier beaucoup plus de l’interruption. Mais encore ceci : j’ai l’idée qu’en français et dans le contexte historique de la chanson, il eût mieux valu utiliser le mot « prodigue », au sens biblique du terme. Autrement dit, il valait mieux évoquer des enfants qui reviennent et qu’on accueille à bras ouverts et « en tuant le veau gras », en faisant débauche de victuailles et de boissons et en passant pudiquement et soigneusement l’éponge sur le passé. Car c’est précisément e qui s’est passé en Allemagne et ailleurs. Il faut cependant distinguer les enfants, comme le fait implicitement la chanson. Car il y a plusieurs sortes d’enfants et il faut éclaircir une fameuse ambiguïté (sur laquelle repose l’ironie de la chanson) entre les enfants de l’Allemagne (les enfants du pays, de la patrie, laquelle est éternelle et amphibie, en ce quelle passe d’un régime à l’autre sans trop de distinction) et les enfants suffisamment jeunes pour ne pas avoir été impliqués directement dans les malversations et les crimes passés. Ceci, vois-tu Lucien l’âne, renvoie très exactement à mon problème de traduction du mot « Wunderkind ». Pour ce qui est des enfants : on aura les enfants « prodigues » qui ressurgissent du passé et les d’enfants « prodiges », ceux du présent. Encore que ce mot « prodiges » me semble sujet à caution, sauf pour les mères pour qui – par principe – tous leurs enfants sont des « prodiges ». Confondre les deux serait une terrible erreur, même si cette erreur fut volontairement orchestrée par les gens du pouvoir. Un discours dans le genre : « La patrie détruite a besoin de tous ses fils pour se reconstruire et retrouver sa prospérité d’antan. » Pour donner une dimension plus large à cette remarque, je te renverrais volontiers à quelques auteurs allemands de l’époque : Ernst Wiechert, Heinrich Böll, Hans-Magnus Enzensberger, Günter Grass et quelques autres sans doute, mais je ne suis pas une encyclopédie vivante et je ne peux te parler que de ce que je sais. Aucun de ceux-là n’a pu accepter cette Allemagne ventrue, mafflue, pesante et satisfaite d’elle-même, sans remords, plongeant sans l’ombre d’une conscience dans sa renaissance économique. Cette Allemagne recyclant sans vergogne – après (pour certains, mais pas pour tous) une sanction, une peine de prison que l’on qualifiera pudiquement de symbolique.
C’est ainsi qu’on a retrouvé à la tête des pouvoirs publics nationaux, régionaux, locaux, à la tête des villes, dans les partis politiques, à la tête des grandes entreprises, des grandes banques, des ministères, de la justice, etc, des gens qui avaient plus que collaboré avec le Troisième Reich, des gens qui en avaient été des acteurs et des responsables. Ce sont ceux-là les « enfants prodigues ». Quant au miracle économique – limité à l’Allemagne dite de l’Ouest, on sait qu’il fut le résultat des injections massives de capitaux et de prêts venant des Zétazunis, d’une mobilisation « patriotique », d’un réel effort populaire pour retrouver une vie plus confortable, d’une vraie compétence technique générale et d’une exploitation de la main d’œuvre, des réfugiés et de gens venant de régions plus défavorisées. Pour l’essentiel, ce fut le cas dans la plupart des pays d’Europe occidentale. Dans le cas de l’Allemagne, particulièrement, il faut ajouter qu’il y eut aussi le fait qu’elle n’a que très peu rendu ce qu’elle avait soutiré par la force aux pays occupés durant la guerre. Quant au miracle économique, tel qu’il est vu par la chanson, il est vu de l’intérieur, il est montré au niveau de la vie quotidienne, il est vu par un citoyen qui constate d’une part une extrême misère, qui n’est pas aidée ou secourue et de l’autre, la mansuétude à l’égard des anciens (?) nazis. Mais, je te laisse découvrir les détails en même temps que la chanson.
C’est bien ce que je disais, ce « miracle économique » n’en était pas un, il était simplement une restauration de l’ordre social tel que le rêve les riches. Quant aux nazis recyclés, il s’agit de nourrir les chiens de garde ; ce sont toujours les mêmes d’un régime à l’autre ; ce sont les piliers de tous les pouvoirs. Quant à nous, Marco Valdo M.I. mon ami, il nous reste à reprendre – miracle économique ou pas – notre tâche et tisser inlassablement le linceul de ce vieux monde peuplé d’enfants prodigues, oublieux, amnésique, amnistiant et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Version française – CHANSON DU MIRACLE ÉCONOMIQUE – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemande – Lied vom Wirtschaftswunder – Wolfgang Neuss – 1958
Pseudonyme de Günter Neumann (1913-1972), d’artiste polyédrique, cabarettiste, auteur-compositeur et pianiste.
Musique de Günter Neumann et de Franz Grothe (1908-1982), compositeur.
Tirée du film : « Wir Wunderkinder » – 1958 (Nous les enfants prodiges).
Allemagne du premier au second après-guerre. Le réalisateur Kurt Hoffmann transpose au cinéma un récit « Wir Wunderkinder » – 1958 (Nous les enfants prodiges) de l’écrivain Hugo Hartung (1902-1972) et, sur un ton pétillant et de cabaret (les scènes sont reliées entre elles par des chansons, en style brechtien), il raconte la montée du nazisme et ensuite la reconstruction de l’Allemagne après la guerre à travers des tribulations de deux protagonistes, Hans Boeckel (interprété de Hansjörg Felmy) et Bruno Tiches (Robert Graf), deux camarades de classe. Le premier est un journaliste honnête rencontrant beaucoup de difficultés sous le régime nazi ; le second est par contre un opportuniste intrigant qui fait carrière durant le Reich et ensuite, se livre au marché noir avec les Alliés et devient un gros entrepreneur. Mais un jour arrive le moment où il faut rendre des comptes.
Comme le racontait Horst Lommer dans ses Nürnberger Betrachtungen, la prétendue « dénazification » de l’Allemagne fut beaucoup plus de la propagande qu’autre chose. Par ailleurs, nous ne « défascistifiâmes » rien ou presque, il est vrai que dans les deux les pays les démocrate-chrétiens revinrent au pouvoir etse recyclèrent dans leurs rangs nombre de gens qui avaient (bien) vécu à l’ombre des régimes. On avait sauvé le statu quo du « grand péril rouge », au prix de quelque compromission avec ceux qui avaient soutenu – ou au moins n’avaient pas dénoncé – le nazifascisme. La reconstruction de l’Europe Atlantique, soutenue par les généreuses subventions américaines, était une priorité qui ne pouvait pas se perdre dans des distinguos et des finesses : tout faisait farine. Ensuite le « miracle économique » des années 60 poussa les démocrate-chrétiens à coopter les sociaux-démocrates, pour se soutenir mutuellement et se partager l’appétissant gâteau ; en Allemagne, ce furent les « Große Koalition », inaugurées par un (ex-) nazi, le chancelier Kurt Georg Kiesinger ; en Italie, ce fut le « Centre-gauche » des divers gouvernements Fanfani (lequel avait beaucoup écrit sur la « Doctrine Fasciste » et avait été parmi les signataires du « Manifeste de la Race ») et Moro (qui pendant le fascisme avait été enseignant de « Politique coloniale » et avait activement participé aux « Littoriali » (Lictoriales), organisés par les Jeunesses Universitaires Fascistes).
Commentaire italien de Bernard Bartleby (Chansons contre la Guerre)
Dialogue maïeutique
Lucien l’âne mon ami, je pense que cette fois, tu ne me demanderas pas trop d’éclaircissements à propos du titre, ni de détails quant à la chanson et à l’histoire qu’elle raconte. Beaucoup a été dit par notre commentateur italien. Cela étant, il nous faut réfléchir au sens de cette histoire et à ce qu’elle peut signifier aujourd’hui. Et là, il y a des choses à dire.
Ho ho, dit Lucien l’âne en ouvrant des yeux comme des pupilles de chat à la tombée de la nuit. Je suis fort impatient de savoir de quelles choses il peut s’agir et aussi, de voir quels genres de commentaires cette chanson va t’inspirer. J’en ai bien une petite idée, mais tout en sachant que tu vas me bassiner de considérations à propos du miracle économique, je me dis que tu le feras d’une façon inhabituelle et c’est ce qui me turlupine – un peu. Ce sera sans doute – je le parie – dans le droit fil de ce qu’on peut deviner de l’ironie de la chanson, car il me paraît que cette chanson recadre les faits et situe – à sa manière – la résurrection économique de l’Allemagne dans un continuum, dans un flux issu des épisodes précédents de son histoire (et de la nôtre, conséquemment).
Tu as vu juste, Lucien l’âne mon ami, mais laisse-moi le temps de mettre mes lunettes. D’abord, car cette canzone est bien une parodie, elle est pleine d’ironie, amère sans soute, mais qui ne l’aurait pas été en voyant ce qui se passait alors en Allemagne. Par parenthèse, ce fut pareil dans tous les pays qui avaient fait partie de l’Axe (notamment, Japon, Italie) ou pour ceux qui dans les pays envahis s’étaient acoquinés avec l’occupant – marché noir, profits, fortunes, postes honorifiques, gratifications, sinécures, prébendes et bénéfices divers à des degrés divers. Bref, c’était « on prend les mêmes et on continue ». Ceci m’amène à une première réflexion concernant le titre du roman « Wir Wunderkinder » de Hugo Hartung et du film qui en est tiré par Kurt Hofmann. Cette réflexion porte sur la traduction du mot « Wunderkind », qui est généralement traduit par « enfant prodige ».
Voilà qui est intéressant, dit Lucien l’âne en approuvant solidement d’un mouvement vertical de la tête et de ses oreilles à contretemps. Mais encore ?
Mais encore ?, reprend Marco Valdo M.I. sans se soucier beaucoup plus de l’interruption. Mais encore ceci : j’ai l’idée qu’en français et dans le contexte historique de la chanson, il eût mieux valu utiliser le mot « prodigue », au sens biblique du terme. Autrement dit, il valait mieux évoquer des enfants qui reviennent et qu’on accueille à bras ouverts et « en tuant le veau gras », en faisant débauche de victuailles et de boissons et en passant pudiquement et soigneusement l’éponge sur le passé. Car c’est précisément e qui s’est passé en Allemagne et ailleurs. Il faut cependant distinguer les enfants, comme le fait implicitement la chanson. Car il y a plusieurs sortes d’enfants et il faut éclaircir une fameuse ambiguïté (sur laquelle repose l’ironie de la chanson) entre les enfants de l’Allemagne (les enfants du pays, de la patrie, laquelle est éternelle et amphibie, en ce quelle passe d’un régime à l’autre sans trop de distinction) et les enfants suffisamment jeunes pour ne pas avoir été impliqués directement dans les malversations et les crimes passés. Ceci, vois-tu Lucien l’âne, renvoie très exactement à mon problème de traduction du mot « Wunderkind ». Pour ce qui est des enfants : on aura les enfants « prodigues » qui ressurgissent du passé et les d’enfants « prodiges », ceux du présent. Encore que ce mot « prodiges » me semble sujet à caution, sauf pour les mères pour qui – par principe – tous leurs enfants sont des « prodiges ». Confondre les deux serait une terrible erreur, même si cette erreur fut volontairement orchestrée par les gens du pouvoir. Un discours dans le genre : « La patrie détruite a besoin de tous ses fils pour se reconstruire et retrouver sa prospérité d’antan. » Pour donner une dimension plus large à cette remarque, je te renverrais volontiers à quelques auteurs allemands de l’époque : Ernst Wiechert, Heinrich Böll, Hans-Magnus Enzensberger, Günter Grass et quelques autres sans doute, mais je ne suis pas une encyclopédie vivante et je ne peux te parler que de ce que je sais. Aucun de ceux-là n’a pu accepter cette Allemagne ventrue, mafflue, pesante et satisfaite d’elle-même, sans remords, plongeant sans l’ombre d’une conscience dans sa renaissance économique. Cette Allemagne recyclant sans vergogne – après (pour certains, mais pas pour tous) une sanction, une peine de prison que l’on qualifiera pudiquement de symbolique.
C’est ainsi qu’on a retrouvé à la tête des pouvoirs publics nationaux, régionaux, locaux, à la tête des villes, dans les partis politiques, à la tête des grandes entreprises, des grandes banques, des ministères, de la justice, etc, des gens qui avaient plus que collaboré avec le Troisième Reich, des gens qui en avaient été des acteurs et des responsables. Ce sont ceux-là les « enfants prodigues ». Quant au miracle économique – limité à l’Allemagne dite de l’Ouest, on sait qu’il fut le résultat des injections massives de capitaux et de prêts venant des Zétazunis, d’une mobilisation « patriotique », d’un réel effort populaire pour retrouver une vie plus confortable, d’une vraie compétence technique générale et d’une exploitation de la main d’œuvre, des réfugiés et de gens venant de régions plus défavorisées. Pour l’essentiel, ce fut le cas dans la plupart des pays d’Europe occidentale. Dans le cas de l’Allemagne, particulièrement, il faut ajouter qu’il y eut aussi le fait qu’elle n’a que très peu rendu ce qu’elle avait soutiré par la force aux pays occupés durant la guerre. Quant au miracle économique, tel qu’il est vu par la chanson, il est vu de l’intérieur, il est montré au niveau de la vie quotidienne, il est vu par un citoyen qui constate d’une part une extrême misère, qui n’est pas aidée ou secourue et de l’autre, la mansuétude à l’égard des anciens (?) nazis. Mais, je te laisse découvrir les détails en même temps que la chanson.
C’est bien ce que je disais, ce « miracle économique » n’en était pas un, il était simplement une restauration de l’ordre social tel que le rêve les riches. Quant aux nazis recyclés, il s’agit de nourrir les chiens de garde ; ce sont toujours les mêmes d’un régime à l’autre ; ce sont les piliers de tous les pouvoirs. Quant à nous, Marco Valdo M.I. mon ami, il nous reste à reprendre – miracle économique ou pas – notre tâche et tisser inlassablement le linceul de ce vieux monde peuplé d’enfants prodigues, oublieux, amnésique, amnistiant et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
CHANSON DU MIRACLE ÉCONOMIQUE
Les rues sont remplies de solitude ;
Passe une auto, elle est très vieille,
Elle cliquette, elle avance de guingois.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue
Les rideaux sont du carton et du bois,
Une mosaïque de papier couvre la clôture.
Celui qui veut fumer peut se servir lui-même.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Nous étions libres auparavant
Maintenant, nous sommes occupés
Le pays est divisé
Que faire à présent ?
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, on a des carbonnades et du flétan fumé.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Le ventre allemand se refait et est déjà vraiment rondelet ;
Le jambonneau a retrouvé son bon goût dans sa gelée.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
On ne doit plus épargner le combustible, on peut rouler ;
Celui qui a des soucis, a aussi de l’alcool et même en quantité ;
Les magasins nous offrent à nouveau des produits de luxe ;
Les premiers nazis écrivent avec application leurs mémoires,
Car les éditeurs manquent de sens critique.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Car nous sommes aussi un pays appauvri
Et qui est pas mal détruit,
Nous montrons que nous sommes imposants.
Comme nous sommes flamboyants,
Nous faisons la bringue à nouveau.
Nous vivons haut haut haut haut haut plus haut !
Car nous sommes aussi un pays appauvri
Et qui est pas mal détruit,
Montrons que nous sommes imposants.
Comme nous sommes flamboyants,
Nous faisons la bringue à nouveau.
Nous vivons haut haut haut haut haut plus haut !
C’est le miracle économique !
C’est le miracle économique !
Certes, il y a des gens qui vivent encore aujourd’hui dans la saleté et le désordre,
Mais pour les enfants des nazis qui sont responsables de cette purée,
Notre État a beaucoup d’argent et chaque mois, il leur distribue des subsides.
Nous sommes une république non qualifiée.
Il n’y a pas de miracle, il n’y a pas de miracle.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Les rues sont remplies de solitude ;
Passe une auto, elle est très vieille,
Elle cliquette, elle avance de guingois.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue
Les rideaux sont du carton et du bois,
Une mosaïque de papier couvre la clôture.
Celui qui veut fumer peut se servir lui-même.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Nous étions libres auparavant
Maintenant, nous sommes occupés
Le pays est divisé
Que faire à présent ?
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, on a des carbonnades et du flétan fumé.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Maintenant, nous avons le miracle économique.
Le ventre allemand se refait et est déjà vraiment rondelet ;
Le jambonneau a retrouvé son bon goût dans sa gelée.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
On ne doit plus épargner le combustible, on peut rouler ;
Celui qui a des soucis, a aussi de l’alcool et même en quantité ;
Les magasins nous offrent à nouveau des produits de luxe ;
Les premiers nazis écrivent avec application leurs mémoires,
Car les éditeurs manquent de sens critique.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Car nous sommes aussi un pays appauvri
Et qui est pas mal détruit,
Nous montrons que nous sommes imposants.
Comme nous sommes flamboyants,
Nous faisons la bringue à nouveau.
Nous vivons haut haut haut haut haut plus haut !
Car nous sommes aussi un pays appauvri
Et qui est pas mal détruit,
Montrons que nous sommes imposants.
Comme nous sommes flamboyants,
Nous faisons la bringue à nouveau.
Nous vivons haut haut haut haut haut plus haut !
C’est le miracle économique !
C’est le miracle économique !
Certes, il y a des gens qui vivent encore aujourd’hui dans la saleté et le désordre,
Mais pour les enfants des nazis qui sont responsables de cette purée,
Notre État a beaucoup d’argent et chaque mois, il leur distribue des subsides.
Nous sommes une république non qualifiée.
Il n’y a pas de miracle, il n’y a pas de miracle.
Il n’y a pas de miracle après la guerre perdue.
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2016/8/15 - 23:35
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Parole di Günter Neumann (1913-1972), artista poliedrico, cabarettista, cantautore, compositore e pianista.
Musica di Günter Neumann e Franz Grothe (1908-1982), compositore.
Nella colonna sonora del film “Wir Wunderkinder” (da noi con il titolo “Finalmente l’alba”), commedia diretta nella Germania Federale dal regista Kurt Hoffmann (1910-2001).
Interpretata dall’attore e cabarettista Wolfgang Neuss (1923-1989), voce narrante nel film, che fu in seguito militante dell’APO, l’Außerparlamentarische Opposition di Rudi Dutschke.
Trovo pure la canzone – con il titolo “Chanson Vom Wirtschaftswunder” – nella raccolta intitolata “Protestsongs.de” realizzata nel 2004 dalla Lieblingslied Records.
La Germania dal primo al secondo dopoguerra. Il regista Kurt Hoffmann traspone in pellicola un racconto dello scrittore Hugo Hartung (1902-1972) e, facendo ricorso ad un tono brillante e cabarettistico (i passaggi sono raccordati tra loro attraverso canzoni, in stile brechtiano), racconta dell’avvento del nazismo prima e poi della ricostruzione della Germania dopo la guerra attraverso le vicende di due protagonisti, Hans Boeckel (interpretato da Hansjörg Felmy) e Bruno Tiches (Robert Graf), due compagni di scuola. Il primo diventa un onesto giornalista, incontrando molte difficoltà sotto il regime nazista, il secondo è invece un intrallazzone opportunista che fa carriera nel Reich e poi si dedica al mercato nero con gli alleati, fino a diventare un grosso imprenditore.
Ma verrà la resa dei conti.
Come già raccontato da Horst Lommer in Nürnberger Betrachtungen, la pretesa “denazificazione” della Germania fu molto più propaganda che altro. D’altra parte, nemmeno noi ci “defascistizzammo” per nulla o quasi, tant’è vero che in entrambi i paesi a prendere il potere furono i democristiani, nelle cui fila si riciclarono molti di coloro che erano (ben) vissuti all’ombra dei regimi. Lo status quo era stato salvato dal “grande pericolo rosso”, a prezzo di qualche compromessuccio anche con chi aveva appoggiato - o quanto meno non contrastato – il nazifascismo. La ricostruzione dell’Europa Atlantica, sostenuta dalle generose elargizioni americane, era una priorità che non poteva perdersi in distinguo e sottigliezze: tutto faceva brodo. Poi il “miracolo economico” degli anni 60 indusse i democristiani a cooptare i socialdemocratici, per tener buoni tutti e spartirsi insieme l’appetitosa torta: in Germania fu la “Große Koalition” (mica l’ha inventata quella “culona intrombabile” della Merkel!) inaugurata da un ex nazista, il cancelliere Kurt Georg Kiesinger; in Italia fu il “Centrosinistra” dei vari Fanfani (che tanto aveva scritto su “Dottrina Fascista” e che era stato tra i firmatari del “Manifesto della Razza”) e Moro (che durante il fascismo era stato docente anche di “Politica coloniale” e che aveva attivamente partecipato ai Littoriali organizzati dai Giovani Universitari Fascisti).