Affaire Rimbaud

Cher Hubert-Félix Thiéfaine dans les chiottes
par Riccardo Venturi.

Cher Hubert-Félix Thiéfaine, il faut d'abord que je te raconte comment je t'ai connu. Bin, la première fois que je t'ai vu, c'était dans les chiottes d'un petit appart' où j'habitais avec ma copine, dans le Nord. Tu sais, elle était beaucoup plus jeune que moi et aimait bien tes chansons et ta musique; donc, elle avait décidé de mettre un poster de Thiéfaine dans les chiottes. Tout à fait normal, n'est-ce pas? Elle m'avait dit que tu avais écrit une chanson sur la cancoillotte, et je suis peut-être le seul italien qui raffole de ce terrible fromage, même de sa version à l'ail. Il arrivait que je prenne mon p'tit déj' à la cancoillotte; donc, cher Hubert-Félix Thiéfaine, c'était tout à fait logique que je fasse ta connaissance. Puis, bien, j'ai même découvert (encore grâce à ma jeune copine, qui ne tenait pas seulement ton poster dans les chiottes, mais aussi tes albums près de sa chaîne) que tu écrivais des chansons. Et quelles sacrées chansons, putain. Voilà l'histoire de ce qui s'est advenu; et maintenant il est temps que mes compatriotes connaissent un peu mieux tes chansons compliquées et pleines d'idées géniales.

Or, rien ne se passe par hasard. Prenons cette chanson-ci que tu as écrit sur Arthur Rimbaud; ou bien, sur Arthur Rimbaud, trafiquant d'armes à Harar, Éthiopie. Tu sais d'où venait ma jeune copine qui tenait ton poster dans les chiottes? De Charleville-Mézières. Donc, cher Hubert-Félix Thiéfaine, il faudra bien que je me lance dans cette aventure, onze ans après. Je ne sais plus rien de cette jeune femme-là, j'espère qu'elle va bien et que tout se passe bien pour elle; je me demande pourtant qu'est-ce qu'il y aura maintenant dans ces chiottes-là, avec l'espoir de qu'il ne s'agit pas d'un poster de Johnny ou de la Star Ac'. Allons donc parler de l' Affaire Arthur Rimbaud, une chanson de 1986 “où la lumière pleut”. Tu sais, on a écrit même en Italie des chansons sur Rimbaud, mais sur le poète Rimbaud. Pas sur le trafiquant d'armes Rimbaud. Pas sur sa jambe gangreneuse. Pas sur les poètes qui “chantent au profit des derniers Danâkil”. On soupçonne à un certain point qu'il y a un lien très, très étroit entre les poètes et la haine, entre la poésie et l'horreur, entre la poétique et les flingues; Milan Kundera disait que la relation entre poésie et police, entre inspiration et délation, est beaucoup plus étroite et plus fréquente qu'on n'est prêt à croire. La “saison en enfer” passe donc de l'abstraction de la poésie au vrai enfer de la guerre et des assassins que le poète sponsorise et approvisionne. Cela, on a tous tendance à l'oublier. Il n'y a qu'un seul Rimbaud, le poète adolescent; Hubert-Félix Thiéfaine nous parle d'un Rimbaud qu'il a le courage d'appeler un assassin. Un Rimbaud d'oltretombe à qui l'on refuse même le cresson bleu du "Dormeur du val". Et il faut du courage pour faire ça. On l'a toujours justifié pour ne pas toucher au poète qu'on aime, un poète qui pourtant était mort à 19 ans.

C'est une chanson bien dure, et bien difficile. Une chanson qui est, pourtant, aussi de la grande poésie, et qui réussit quand-même à être un brutal hommage à Rimbaud, d'autant plus beau qu'il est difficile à avaler. On va la voir, alors. On va l'écouter et traduire. Et, puis, je n'ai plus goûté à la cancoillotte, tu sais. [RV]



Caro Hubert-Félix Thiéfaine dentro al cesso
di Riccardo Venturi.

Caro Hubert-Félix Thiéfaine, prima di tutto bisogna che ti racconti come t'ho conosciuto. Beh, la prima volta che ti ho visto, è stata dentro al cesso di un appartamentino dove abitavo con la mia compagna di allora, nel dipartimento del Nord. Sai, lei era molto più giovane di me e le piacevano parecchio le tue canzoni e la tua musica; aveva quindi deciso di mettere un poster di Thiéfaine dentro al cesso. Assolutamente normale, no? Mi aveva detto che avevi scritto una canzone sulla cancoillotte, e io sono forse l'unico italiano che va pazzo per quel formaggio terrificante, anche nella sua versione all'aglio. Alle volte, facevo colazione con la cancoillotte; quindi, caro Hubert-Félix Thiéfaine, era del tutto logico che facessi la tua conoscenza. Poi, beh, ho pure scoperto (grazie sempre alla mia giovane compagna, che non teneva soltanto un tuo poster dentro al cesso ma anche i tuoi album vicino all'impianto stereo) che scrivevi canzoni. E che razza di canzoni, porca puttana. Ecco la storia di quel che è successo; ora è tempo che i miei compatrioti conoscano un po' meglio le tue canzoni complicate e genialmente concettuose.

Ora, niente accade per caso. Prendiamo questa canzone che hai scritto su Arthur Rimbaud; o meglio, su Arthur Rimbaud trafficante d'armi a Harar, Etiopia. Lo sai da dove veniva la mia giovane compagna che teneva il tuo poster dentro al cesso? Da Charleville-Mézières. Quindi, caro Hubert-Félix Thiéfaine, bisognerà davvero che mi butti in quest'avventura, undici anni dopo. Non so più nulla di quella ragazza, spero che stia bene e che tutto le vada bene; però mi chiedo che cosa ci sarà ora dentro quel cesso, sperando che non sia un poster di Johnny Hallyday o della Star Academy. Parliamo allora di Affaire Rimbaud, una canzone del 1986 “dove piove la luce”. Sai, anche in Italia sono state scritte canzoni su Rimbaud, ma sul poeta Rimbaud. Non sul trafficante d'armi Rimbaud. Non sulla sua gamba incancrenita. Non sui poeti che “cantano per gli ultimi Dancali”. A un certo punto si sospetta che ci sia un legame molto, molto stretto tra i poeti e l'odio, tra la poesia e l'orrore, tra la poetica e le armi; Milan Kundera diceva che la relazione tra poesia e polizia, tra ispirazione e delazione è molto più stretta di quanto non si sia pronti a credere. La “stagione all'inferno” passa allora dall'astrazione della poesia all'inferno vero della guerra e degli assassini che il poeta sostiene e rifornisce. Tutti quanti tendiamo a dimenticare questa cosa. Non c'è che un solo Rimbaud, il poeta adolescente; Hubert-Félix Thiéfaine ci parla di un Rimbaud che osa chiamare un assassino. Un Rimbaud oltretombale cui si nega anche il fiore dell'"Addormentato nella valle". E ci vuole del coraggio per farlo. Lo si è sempre giustificato per non toccare il poeta che si ama, un poeta che però è morto a 19 anni.

È una canzone durissima e difficilissima. Una canzone che è anche grande poesia, e che riesce comunque ad essere un brutale omaggio a Rimbaud tanto più bello quanto difficile da buttar giù. Andiamo a vederla, allora. A ascoltarla e a tradurla. E, poi, non ho più assaggiato la cancoillotte, sai. [RV]