Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Évitant
Émotions
Et passions
Et jusqu'aux sentiments,
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Qui sait depuis quand,
Amené par quel courant ?
Comme une pierre tombée
Ou une bouse séchée
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Je songe à la sortie
Pour autant que ce ne soit pas
Une histoire finie,
Et que le départ ne soit pas
Un voyage imposé
Vers un autre séjour forcé.
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Cette chambre toujours
Aussi froide qu'au premier jour,
Je l'ai vue et revue
Et elle ne m'est plus en rien inconnue.
C'est un être
Aux dimensions mesurables
Chaise, lit, table, fenêtre
Ouverte à nonante degrés
Il ne me déplairait pas de la quitter.
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Noyé dans les rythmes du temps,
Leur répétition interminable,
Odieuse à d'autres moments,
M'est devenue agréable.
L'intensité de mes mouvements,
Le niveau de mon tempérament
N'ont jamais été aussi bas
Et je ne m'en afflige pas.
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Dans un état transitoire
D'espérance ou de désespoir,
En sachant que je partirai demain,
Je n'ai pas sommeil,
J'écoute le réveil.
Qui tiquetaque vers le matin.
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Évitant
Émotions
Et passions
Et jusqu'aux sentiments,
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Qui sait depuis quand,
Amené par quel courant ?
Comme une pierre tombée
Ou une bouse séchée.
Ni libre ni asservi,
Évitant
Émotions
Et passions
Et jusqu'aux sentiments,
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Qui sait depuis quand,
Amené par quel courant ?
Comme une pierre tombée
Ou une bouse séchée
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Je songe à la sortie
Pour autant que ce ne soit pas
Une histoire finie,
Et que le départ ne soit pas
Un voyage imposé
Vers un autre séjour forcé.
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Cette chambre toujours
Aussi froide qu'au premier jour,
Je l'ai vue et revue
Et elle ne m'est plus en rien inconnue.
C'est un être
Aux dimensions mesurables
Chaise, lit, table, fenêtre
Ouverte à nonante degrés
Il ne me déplairait pas de la quitter.
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Noyé dans les rythmes du temps,
Leur répétition interminable,
Odieuse à d'autres moments,
M'est devenue agréable.
L'intensité de mes mouvements,
Le niveau de mon tempérament
N'ont jamais été aussi bas
Et je ne m'en afflige pas.
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Dans un état transitoire
D'espérance ou de désespoir,
En sachant que je partirai demain,
Je n'ai pas sommeil,
J'écoute le réveil.
Qui tiquetaque vers le matin.
Je gis ici
Ni libre ni asservi,
Évitant
Émotions
Et passions
Et jusqu'aux sentiments,
Je gis ici
Mi-libre mi-asservi,
Qui sait depuis quand,
Amené par quel courant ?
Comme une pierre tombée
Ou une bouse séchée.
inviata da Marco Valdo M.I. - 31/3/2010 - 22:05
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Bouse séchée – Marco Valdo M.I. – 2010
Cycle du Cahier ligné – 101
Bouse séchée est la cent et unième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.
Excuse-moi, Marco Valdo M.I. mon ami, mais je trouve encore une fois que le titre de ta canzone est bien étrange.
Lucien l'âne aux grandes dents et aux sabots d'ébène, laisse-moi te dire le pourquoi du comment de ce titre étrange en effet. Le fait est que lorsque je fais une chanson, je ne sais généralement pas au départ comment elle sera, quels seront les mots qui la composeront, ni dans quel ordre, ni dans quelle combinaison. Le sens-même de la chanson change parfois au cours de la confection. La chanson – et cela tu le sais – est une sorte d'étrange alchimie, c'est une création, elle est (souvent) expérimentale. Quelquefois, elle démarre sur un mot, quelque fois sur une idée et comme l'eau qui sourd, elle glisse vers sa fin sans qu'on sache par où, ni comment elle va y arriver. Quelquefois, elle a l'air faite et soudain, à la (re)lecture, je change un mot, qui en change un autre et finalement, change toute la chanson. Ce n'est pas du tout linéaire, cette chose-là. Je ne sais si je me fais bien comprendre.
Si, évidemment que si. J'ai bien compris, Marco Valdo M.I. mon ami. La chanson, en somme, est comme le périple de l'âne ou le voyage d'Ulysse... Une sorte d'errance au pays des mots et des musiques. Mais çà ne répond pas à ma question sur l'étrangeté du titre. « Bouse séchée »... N'y avait-il pas moyen de l'intituler autrement ?
Bien sûr que si, Lucien l'âne mon doux ami, mais c'eût été une autre canzone. En fait, je te rappelle ce qui est dit en début de chacune des canzones du Cycle : Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi. Et cette image de la bouse (de vache) séchée figure dans ces éléments. Et regarde bien qu'il s'agit là d'un moment essentiel de la vie de notre ami le guerrier-prisonnier, de notre songeur : « je gis ici... comme une bouse séchée ». Voilà à quoi l'humain est réduit par la prison, par l'enfermement... à un excrément séché. Tel est le sens du titre. Une dénonciation forte de la violence faite par l'incarcération. Et cette image s'est imposée d'elle-même comme l'ultime diagnostic, comme la description la plus nette de la situation de celle ou de celui qu'on réduit à un état quasiment végétatif. Vois, si notre ami le songeur n'avait pas eu cette ressource de résister par ses escapades continues hors de ce réel terrifiant, par ses explorations dans ce fabuleux monde intérieur – cet avers de l'espace intersidéral, cet univers en miroir où naissent et renaissent des milliards de galaxies, imprévisibles et inconnues, hasardeuses et merveilleuses – il se serait tout simplement suicidé, ainsi que le font bon nombre d'enfermés.
En somme, dit Lucien l'âne, le maquis du songeur est dans son esprit, dans son for intérieur.
Exactement, son for intérieur, c'est là le lieu de la résistance et comme bien tu le penses, la sentence : Ora e sempre : Resistenza !, pour lui, est aussi une règle de (sur)vie.
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane