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Les Rats noirs

Marco Valdo M.I.
Langue: français



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Les Rats noirs


Les Rats noirs – Marco Valdo M.I. – 2010
Cycle du Cahier ligné – 99


Les Rats noirs est la nonante-neuvième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.

Ohlala!, dit Lucien l'âne en grignant comme une dame – par sa grimace, Lucien l'âne renvoie à certaine dame de Grignan, dont Saint-Simon disait qu'elle fut « peu regrettée de son mari, de sa famille et des provençaux » , voilà les rats noirs maintenant. Quel anthropomorphisme ! Mais il est vrai que les rats noirs, a priori, comme çà, ont une réputation peu sympathique. Mais enfin, vous les humains, pourquoi renvoyez-vous toujours sur les animaux vos défauts ?

Tu as bien raison, Lucien l'âne mon ami, et je le regrette bien. Les rats, même noirs, ont droit au respect... Mais ici, c'est une pure métaphore, qui doit d'ailleurs venir de la nuit des temps où, en effet, les rats couraient dans les maisons, les fossés et les ruelles et où outre de jouer les éboueurs, ils outrepassaient leur tâche (honorable, celle-là) en s'en prenant (dit la vox populi) directement à certains humains et en transportant partout, la peste et autres maladies. Les « rats noirs », ici, sont ces gens qui portent partout la peste brune ou noire. Il fut un temps où dans certain pays, l'Italie, ils se vêtaient d'orbace noire; d'autres, des de la même espèce assassine, dans leurs uniformes noirs à la tête de mort (Totenkopf) massacrèrent des populations entières. À présent, ils circulent en costume trois-pièces, se présentent aux élections, composent des gouvernements, portent la cravate et sourient à la télévision, mais au fond des choses, ce sont les mêmes... Ils assiègent la société depuis des années et – regarde le dernier vers, leur but est bien de détruire jusqu'au dernier souffle, le vent de liberté venu du joli mois de Mai.

J'aime mieux çà, dit Lucien l'âne, ton explication me rassure. Je croyais que notre ami le rêveur était devenu raciste. En somme, c'est une parabole, c'est une fable, comme en faisaient Ésope et La Fontaine et bien d'autres encore.

En somme, c'est là un épisode de la Guerre de Cent Mille Ans. Tu sais, Lucien mon ami l'âne, tu sais bien cette guerre que les riches et les puissants mènent par tous les moyens contre les pauvres en vue d'accroître leurs privilèges, leurs minables richesses et leur exécrable domination.

Reprenons alors notre patient tissage, dit Lucien l'âne. Faisons comme les Canuts de Lyon, « tissons le linceul du vieux monde », de ce vieux monde détestable et cacochyme.

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Mi-tempête, mi-ouragan,
La chaleur est revenue subitement
Les rats noirs ont grandi
Leurs dents ivoires aussi.
En bandes, ils rongent les fils téléphoniques
Ils sautent le fossé historique
Ils arrivent avec les incisives prêtes
Et des sourires de fête.
Si nous résistons,
Nous vivrons.
Le médecin enfile un tensiomètre,
Au bras du géranium, sur l'appui de fenêtre;
Sur la terrasse, la bougie allumée
N'ose plus qu'une flammèche exténuée;
Quelque chose leur manque pour vraiment exister:
Il manque l'air de la liberté,
Il manque le la du diapason.
Ainsi, nous étouffons
Sans futur, sans chanson.
Quand nous rentrons,
Nous retrouvons l'armoire ouverte
Les rapports, la table jaune-verte,
Les géraniums malades, le corridor
Et ses allures de croque-mort.
Cette nuit agitée, cette nuit
Mi-tempête, mi-ouragan,
La terreur est revenue subitement
Les rats noirs se sont ressaisis
Et sont ressortis de leurs palais
Pour effacer le joli rêve de Mai.

envoyé par Marco Valdo M.I. - 23/3/2010 - 09:45




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